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Sur le front de l’aide à l’enfance
Article mis en ligne le 27 mars 2021

Un éducateur, chargé d’enquêtes sociales sur les situations familiales, s’est suicidé à Strasbourg sur son lieu de travail. Partout, des travailleurs sociaux se mobilisent, réclamant d’autres conditions d’exercice de leurs missions (trois journées d’action prévues du 7 au 9 avril). Télérama consacre un dossier à l’enfance maltraitée et Marie Vaton publie un livre sur la protection de l’enfance.

Le jeudi 11 mars les salariés de l’Association Régionale Spécialisée d’action sociale et d’Éducation et d’Animation (ARSEA), à Strasbourg, ont appris qu’un de leurs collègues du Service d’investigation éducative s’était suicidé en se défenestrant le 8 mars au soir. Rue 89 Strasbourg qui en rend compte indique que l’éducateur, âgé d’une soixantaine d’années, aurait laissé, avant son passage à l’acte, un courriel adressé « à ses collègues et à sa hiérarchie en mettant en cause son travail ». La direction aurait incité les salariés à ne pas ébruiter ce drame.

Le Président de l’ARSEA précise que l’éducateur évoque dans son texte la question « du confinement, explique que c’est compliqué de travailler à la maison. Il parle aussi de ses supérieurs hiérarchiques et il y a des critiques qui sont formulées. C’est ensuite à l’inspecteur du travail, ainsi qu’à nous, en interne, de faire la part des choses. C’est un service qui n’avait jamais fait parler de lui et nous n’étions au courant d’aucun dysfonctionnement particulier ».

Rue 89 cite une salariée qui nuance. Selon elle, il existe « un contexte interne compliqué », avec une pression à la rentabilité sur le travail des éducateurs : « il y a un problème au niveau de la direction générale, qui nous demande de plus en plus, avec moins de moyens ». Ce service d’investigation est très sollicité : il réalise des enquêtes sociales sur demande du juge des enfants, en vue de placement éventuel en établissement ou en famille d’accueil. L’enquête doit évaluer si l’enfant est en danger. Les situations familiales sont de plus en plus dégradées, et il faut intervenir rapidement.

Évidemment, on ne sait ce qui peut conduite un tel professionnel à se résoudre à un tel geste, sur son lieu de travail (une enquête judiciaire et une autre de l’Inspection du travail ont été ordonnées). Ce que l’on sait pour le moment c’est qu’une centaine d’employés de l’association avait manifesté le 21 janvier pour dénoncer des conditions de travail insatisfaisantes.

Les Dernières Nouvelles d’Alsace ont interrogé le docteur Philippe Meyer, responsable du service des urgences de psychiatrie aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui observe « une augmentation des tentatives de suicide, de l’ordre de 10 à 20% en 2020. Et une évolution de ces tentatives vers des modes violents, par pendaison, arme à feu, accident de véhicule ou précipitation dans le vide ».

Mouvements dans le social et l’éducatif

De façon générale, les professionnels se plaignent de conditions de travail de plus en plus difficiles, parce que les situations sociales s’aggravent et parce que les moyens ne suivent pas. Et parce qu’aussi l’encadrement, le plus souvent, n’est pas à la hauteur. (...)

Leurs actions ne sont pas portées par le politique. Pire, le politique laisse délibérément une partie des médias dérouler un travail social bashing, parce que cela satisfait les people dames patronnesses et évite d’interroger les politiques publiques d’action sociale.

Il semble cependant que cela commence à bouger dans le secteur : les salariés de la Sauvegarde 93 ont manifesté mardi pour dénoncer leur conditions de travail et un management autoritaire Pour les mêmes raisons et pour non versement de la prime Covid, les professionnels du Centre départemental de l’enfance du Var au Pradet étaient en grève ce jeudi 25 mars.

A Grenoble, ça bouge dans l’école du travail social et des travailleurs sociaux en lutte présentent leur action à l’Agora de la Maison de la Culture occupée. Une grève des salariés du CAMSP et du CMPP a eu lieu dans l’Aude. Au Foyer de l’enfance des Alpes-Maritimes (FEAM), les personnels se sont réunis sur le parvis du palais de justice hier (25 mars).

À Nantes, ce mardi 16 mars, environ 200 travailleurs sociaux en mal de reconnaissance se sont rassemblés, à l’heure de l’Agora, devant le Graslin occupé par les artistes. Ils se plaignent, entre autres, d’avoir été exclus du Ségur et de n’avoir pas été bénéficiaires de l’augmentation de 183 euros qui y a été décidée.

Toutes ces actions et bien d’autres sont peu relayées par les grands médias alors même qu’un article du MediaSocial titrait récemment : Covid-19 : les travailleurs sociaux parmi les plus exposés au risque de contamination.

Trois journées d’action dans le travail social sont prévues les 7, 8 et 9 avril. (...)