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Total mise à fond sur l’huile de palme, cause de déforestation
Article mis en ligne le 24 décembre 2016
dernière modification le 19 décembre 2016

La France est sans doute le pays où l’on aime le moins l’huile de palme. En dix ans, ce discret ingrédient est devenu un vrai sujet de société, forçant les industriels de l’agroalimentaire à réagir. Aujourd’hui, s’afficher « sans huile de palme » est devenu la norme et tartiner son pain de Nutella, un sacrilège. En quelques années, la consommation d’huile de palme pour l’alimentation a été divisée par deux. Une bonne nouvelle pour les orangs-outans ?

Pas sûr, car nous sommes loin d’en avoir fini avec notre dépendance à l’huile de palme.

À peine chassée de nos frigos, l’huile de palme s’est glissée dans le réservoir de nos voitures… et elle y coule à flots ! Aujourd’hui, près de la moitié de l’huile de palme importée en Europe est incorporée comme « biocarburant » dans le gazole que nous trouvons tous les jours à la pompe. L’Europe, en obligeant les distributeurs de carburants à incorporer des « biocarburants », pensait offrir un juteux débouché à des agriculteurs en crise. Le calcul était simple : l’huile de palme étant relativement visqueuse, il n’était pas possible de l’utiliser directement dans les moteurs, contrairement à l’huile de colza ou de tournesol produites en Europe. Et cela a très bien fonctionné quelques années créant une situation de rente pour des entreprises comme Avril, et son patron Xavier Beulin. Mais, depuis que les industriels du raffinage ont mis au point une nouvelle technique pour modifier l’huile de palme et la rendre plus fluide, ce verrou a sauté. (...)

En France, notre champion national, Total, est à la manœuvre. Près de Martigues, à La Mède, Total est en train de reconvertir sa raffinerie en « bioraffinerie » et assume publiquement qu’il importera pour cela en majorité de l’huile de palme. La capacité de cette raffinerie : 500.000 tonnes. À elle seule, cette usine doublerait donc la consommation française d’huile de palme. (...)

Malgré notre interpellation, Mme Royal n’a pas pris officiellement position contre ce projet. Elle en a pourtant le pouvoir, car en tant que ministre de l’Énergie, c’est elle qui délivre les autorisations d’exploitation des raffineries.

Elle en a surtout la responsabilité, car c’est un article de sa loi sur la transition énergétique qui ouvre en grand les vannes à huile de palme. (...)

Total cherche à se dédouaner en prétendant que son huile de palme sera certifiée « durable », mais aucun système de certification actuel n’offre de garanties suffisantes. (...)

Avec ce projet, Total adopte la stratégie qui lui a toujours réussi : miser sur le chantage à l’emploi pour forcer les pouvoirs publics à adopter des politiques en sa faveur. Si l’huile de palme intéresse autant Total, c’est simplement parce que c’est l’huile la moins chère et donc la promesse de profits accrus. Que les pouvoirs publics essaient ensuite de restreindre l’utilisation d’huile de palme, et Total menacera de fermer le site. La seule chance d’éviter de prendre en otage les salariés à l’avenir, c’est de forcer Total à revoir son plan de reconversion du site industriel de La Mède.

Et pour cela, Madame Royal, il faut fermer les vannes à huile de palme tant qu’il est en encore temps.