
Grâce notamment aux succès de ses athlètes qui ont revendiqué leurs origines, leur orientation sexuelle ou leur genre, le Brésil est assuré de remporter au minimum 20 médailles aux JO de Tokyo. Un record dans l’histoire du pays, au grand dam de son président très conservateur, Jair Bolsonaro. (...)
"Cette médaille est dédiée à tous ceux qui ont lutté pour la défense des droits des femmes et des personnes LGBT", a ainsi lancé Ana Marcela Cunha, qui partage la vie d’une internationale brésilienne de water-polo. (...)
Des victoires qui contribuent "à donner de la visibilité à d’autres modes de vie"
Les exploits de l’équipe olympique du Brésil, dont la population est à 55 % noire ou métisse, est un pied de nez aux prises de position très conservatrices de Bolsonaro, régulièrement accusé de tenir des propos racistes, misogynes et homophobes.
La commission inter-américaine pour les droits de l’Homme a d’ailleurs alerté, en avril, sur l’augmentation des crimes et des discours liés à la haine de l’autre depuis l’arrivée au pouvoir du président brésilien en 2019.
"Ces victoires de femmes, de personnes noires et de personnes LGBTQIA+ contribuent à donner de la visibilité à d’autres modes de vie, qui étaient opprimés, exclus et maintenus largement invisibles jusqu’à récemment dans notre histoire", a déclaré l’anthropologue Claudia Kessler de l’Université fédérale de Rio Grande do Sul.
Au Brésil, "l’esclavage des personnes noires (qui n’a été aboli qu’en 1888, NDLR), l’internement forcé des homosexuels dans des hôpitaux psychiatriques et l’absence de droits civiques pour les femmes ont duré des siècles", a-t-elle rappelé à l’AFP.
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De fait, les sportives ont brillé à Tokyo. Et pourtant, les femmes qui réussissent au Brésil ne sont pas bien vues et on ne leur facilite pas la tâche. Elles gagnent ainsi 76,5 % du salaire des hommes à travail égal, selon un rapport datant de 2018 émanant de l’institut national des statistiques, qui relève que "les femmes étudient davantage, travaillent davantage mais sont moins bien payées que les hommes".
Le pays a une longue tradition machiste et la violence faite aux femmes est ancrée dans la culture locale : le Brésil a enregistré 1 350 féminicides l’an dernier, 23 000 cas de violences domestiques et environ 14 000 viols, selon le Forum brésilien sur la sécurité publique.
Et une loi interdisant aux femmes brésiliennes de pratiquer des sports jugés "incompatibles avec leur nature", notamment le football, la boxe, le rugby et l’haltérophilie, n’a été abrogée qu’il y a 40 ans.
"Le pouvoir du sport, la visibilité des Jeux olympiques et les victoires (à Tokyo) vont aider à relancer un nécessaire débat national sur les minorités, les femmes, les gays, les personnes noires au Brésil", a déclaré la sociologue Marcia Couto de l’université de Sao Paulo.
Pas de félicitations du président Bolsonaro
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