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Sauve qui peut ! Revoilà les touristes
/geographie en mouvement
Article mis en ligne le 13 novembre 2021
dernière modification le 12 novembre 2021

Les Parisiens, peu aimés par ceux qui n’habitent pas la capitale, s’étonnent de l’attractivité de leur ville qu’on dit polluée, bruyante, dangereuse, chère… Depuis la Toussaint, les défilés de touristes derrière leurs guides ont repris. Les (bons) restaus sont bondés. Retour d’une catastrophe annoncée ? Pas pour Macron, qui s’improvise Gentil organisateur du tourisme en France.

On se gratte la tête. D’un côté, Macron-le-grand-leader-qui-s’occupe-de-tout, a convoqué un « sommet » (le mot vaut son pesant d’or) à l’Hôtel de la Marine le 4 novembre. Il a disserté, tel un bon énarque pendant quarante minutes, sur un sujet qu’il s’est lui-même fixé : comment « booster » l’industrie du tourisme ? En commençant par énoncer des chiffres : 7,4% du produit intérieur brut, deux millions d’emplois directs et indirects. Un poids à mettre en rapport avec les 38 milliards d’aides reçues par le secteur qui s’est, pourtant, senti… négligé faute d’avoir un ministre de plein exercice. En fait, le ministre, c’est Macron (entouré de six ministres) qui offrait le matin une réception à l’Elysée et annonçait en dessert, un « plan de reconquête du tourisme » pour la mi-novembre. Pourquoi pas lors du sommet ? Parce que ce raoût Destination France était totalement improvisé avec un gouvernement à peine au courant. (...)

Dans le « plan de reconquête », les professionnels attendent des mesures pour dispatcher les touristes sur l’ensemble du territoire, en évitant la surfréquentation (qu’en pense Anne Hidalgo ?), en « accélérant dans le numérique », en augmentant les dessertes aériennes en régions (en totale contradiction avec l’accord de Paris sur les émissions de gaz à effet de serre), en créant des emplois hôteliers dans les campagnes, en développant les trains de nuit… Tout ça pour « regagner des parts de marché ». Car la France se traine toujours en troisième position après les Etats-Unis, champions du divertissement et l’Espagne qui a une longue expérience du tourisme de masse depuis le franquisme.

Dubaï, modèle de tourisme pour la France ?

Mais voilà. Vue comme une case du monopoly touristique mondial, la France « recule » face à l’Asie du Sud-Est, le golfe Persique ou les Balkans. Et la France « championne » est plutôt ivre de statistique erronées, du fait de sa position géographique entre Nord et Sud de l’Europe. Mais qu’importe ! Pour lancer des cocoricos, les politiques ont besoin de « records », de classements. Mais dans le tiroir-caisse, la rente est jugée bien pauvre. La faute à l’accueil « défaillant » (Dominique Marcel), à une offre médiocre, des séjours « trop courts », des hots spots (comme l’Ile-de-France) dont il est difficile de sortir les visiteurs… Vue par la sociologie, l’activité touristique est jugée insuffisante pour les « millenials » (la génération née entre 1980 et 2000) selon Atout France qui aimerait plus « faire la fête à Berlin, en Espagne en Croatie »…. L’opérateur n’a-t-il pas eu vent des ravages du tourisme de masse à Barcelone ?

Et notre tour operator élyséen, qu’en dit-il ? Il fallait l’entendre faire l’éloge de la France, ses sites, ses paysages (« grandioses, sauvages et colorés » grinçait le géographe Pierre Gentelle qui aimait le deuxième degré), son « art de vivre », ses musées « mondialement connus », son TGV, ses festivals. Notre président philosophait : « En développant la synergie entre l’ensemble de nos atouts, on doit réussir à développer un modèle touristique porteur de beaucoup plus de sens, intégré sur nos territoires, beaucoup plus fin, qui développe des parcours et des expériences beaucoup plus profondes. » A quoi répond l’écho du sous-ministre Jean-Baptiste Lemoyne : « L’offre, l’offre, l’offre. On est dans un monde où les gens recherchent des expériences. » (...)

La presse, les internautes réagissent : « Le tourisme est un poison au-delà d’une faible dose » écrit l’un. Voici un autre qui se moque de l’Insee : « En fait les touristes passent juste par la France. Les seuls qui s’y arrêtent sont les migrants. » Un troisième fait remarquer : « Il y a de quoi se marrer... il y a à peine trois jours, Manu était pour se battre contre la pollution. Aujourd’hui, il met tout en oeuvre pour que les touristes reviennent... et ils vont venir comment les Chinois et les Américains, à dos d’âne ? ». (...)