
Hier, après 76 jours de détention, une bonne dizaine de passages devant un juge, plus de recours introduits que France Terre d’asile n’a introduit pour aucun autre retenu du centre de retention de Coquelles, quatre vols réservés (et payés je suppose) par la préfecture et deux tentatives d’expulsion, Salah est libre.
Après 15690 signatures de cette pétition, pres de 6000 partages de celle ci sur les réseaux sociaux, des centaines de lettres magnifiques envoyées par email par des citoyens solidaires au Préfet du Pas de Calais, Fabien Sudry, et au Ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, toutes sans exception restées sans réponse, après un recours gracieux et un recours hiérarchique adressés aux mêmes par des citoyens par recommandé, également restés sans réponse. Salah est libre.
Après tout cela, Salah est libre. Il va pouvoir défendre sa demande d’asile sans craindre pour ses jours. J’espère que nous allons réussir à le convaincre quil peut parler de ce qui lui est arrivé au Soudan sans craindre que la France ne transmette son récit au Soudan avec lequel manifestement elle est déterminée â collaborer malgré la violence du nouveau régime.
Au bout de tout cela, je ne comprends toujours pas ce qui fonde cette implacable détermination du Préfet Fabien Sudry et du Ministre Christophe Castaner, et des autres pays europeens d’ailleurs qui ne font pas mieux, à expulser des demandeurs d’asile vers les régimes dictatoriaux qui sévissent dans leurs pays.
J’ai beau reflechir, je ne vois qu’une seule explication : nous ne sommes plus désormais dans des états de droit fondés sur le respect de la vie humaine sans distinction. Nous vivons dans des états qui déterminent des catégories d’humains -sans papiers, noirs, pauvres, sans emploi, différents- auxquelles le droit s’applique différemment. Et même auxquelles s’appliquent des droits différents.
Y compris le droit de ne pas être torturé, ou privé de liberté. Le droit de vivre dans la dignité. Le droit de vivre tout simplement.
Nous avons regardé ces pays - le Brésil, la Corée, les États Unis, la Hongrie, etc - basculer dans la violence et l’arbitraire, rassurés d’être ici à l’abri de nos lois et de nos mécanismes démocratiques bien rodés. Ils sont anciens et subtils, ont été forgés dans la douleur de la guerre, ils doivent nous protéger.
L’histoire de Salah nous a montré que nos lois, nos principes démocratiques sont aujourd’hui menacés. Et meme que, parfois, ce sont les lois qui menacent nos principes démocratiques comme la nouvelle loi française sur l’asile et j’ai en tête plein d’exemples belges aussi.
Mais nous avons été la. Nous sommes là. Nos avons ouvert les yeux. Et nous découvrons que nous pouvons faire changer les choses.
Mercredi dernier, un juge a rejeté le caractère non suspensif du recours à la cour nationale du droit d’asile imposé dans la nouvelle loi. Il a estimé que Salah ne pouvait pas être expulsé tant que le recours n’était pas jugé par la Cnda. Je n’y connais rien au droit français mais j’espère que cela pourra faire jurisprudence et que d’autes juges pourront s’appuyer sur cette décision.
Merci d’avoir été touchés par l’histoire de Salah.
Merci de ne l’avoir pas enfermé dans une catégorie.
Merci d’avoir affirmé avec la force de votre nom que le droit devait être le même pour tous. Que Le droit à vivre librement et dans la dignité était celui de tous, sans distinction de race, de genre, de confession ou d’origine sociale.
Merci d’avoir contribué, par votre présence à ses côtés, à faire bouger les lignes.
Nous sommes là. Nous serons là.
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