
Les démantèlements des campements de Saint-Denis et de la place de la République ont imposé ce jeune homme de 25 ans comme porte-parole des exilés afghans. Lui-même ancien réfugié, il assure défendre tous les demandeurs d’asile et a fait de l’hébergement des migrants son combat.
Il souffle un vent glacial le long de l’avenue McDonald, à deux pas de la porte d’Aubervilliers, dans le nord de Paris. Quelques jeunes hommes se sont regroupés le long des bâtiments, pour tenter de se mettre à l’abri du froid mordant. La plupart sont afghans.
À peine arrivé près d’eux, Reza Jafari est assailli de questions. Depuis l’évacuation du campement de Saint-Denis, le 17 novembre, ce jeune Afghan de 25 ans, devenu français en 2013, se fait le porte-parole des exilés afghans, la première nationalité parmi les demandeurs d’asile en France. (...)
Né en Afghanistan, dans la région de Ghazni, Reza Jafari a connu l’exil en Iran dès son plus jeune âge. Privé de scolarité et discriminé en raison de sa nationalité, il prend la route de l’Europe en 2009, à l’âge de 14 ans, quelques années après la mort de ses parents. À son arrivée à Paris, il passe 15 jours sous le pont de Jaurès avant d’être pris en charge en tant que mineur.
Reza Jafari connaît donc cette sorte de brouillard dans lequel les demandeurs d’asile se trouvent à leur arrivée dans un pays dont ils ne parlent pas la langue et où les démarches administratives complexes ne leur laissent aucun répit.
Depuis quelques semaines, il se rend en soirée dans les quartiers de Rosa Parks et de la porte de la Chapelle, dans le nord de la capitale : "Je cherche surtout s’il n’y a pas de primo-arrivants pour les orienter vers des hébergements". (...)
À ceux qui sont encore à la rue, Reza Jafari parle d’un accueil de jour près de la gare d’Austerlitz. "Si on refuse de t’héberger là-bas, demande un papier qui le dit comme ça on peut porter plainte, parce qu’il fait vraiment froid là", dit-il à un homme en blouson bleu, l’air perdu.
"Prendre de la distance"
Outre l’hébergement, beaucoup de demandeurs d’asile le sollicitent aussi pour des conseils ou juste un mot d’encouragement. (...)
À ceux qui sont encore à la rue, Reza Jafari parle d’un accueil de jour près de la gare d’Austerlitz. "Si on refuse de t’héberger là-bas, demande un papier qui le dit comme ça on peut porter plainte, parce qu’il fait vraiment froid là", dit-il à un homme en blouson bleu, l’air perdu.
"Prendre de la distance"
Outre l’hébergement, beaucoup de demandeurs d’asile le sollicitent aussi pour des conseils ou juste un mot d’encouragement. (...)
Aujourd’hui, le jeune Afghan aux cheveux coiffés en brosse, soutient les demandeurs d’asile mais il n’a plus le droit de les conseiller dans leurs démarches administratives. Devenu interprète auprès de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), il a prêté serment et est tenu à l’impartialité.
En rejoignant la CNDA, Reza Jafari espérait pouvoir "prendre de la distance" avec les exilés et se concentrer sur l’activité de son association Enfants d’Afghanistan et d’ailleurs, créée en 2012. Mais son téléphone continue de sonner en permanence et les applications de messagerie affichent des centaines de notifications.
"C’est une honte pour la France"
Reza Jafari a été propulsé porte-parole des exilés afghans à la suite de l’évacuation du campement de Saint-Denis mais, avant cela, un événement l’avait déjà poussé à s’engager pour l’hébergement des personnes migrantes.
Fin septembre, des familles afghanes l’appellent au milieu de la nuit. Avec des familles africaines installées, comme elles, porte d’Aubervilliers, elles ont été délogées de leur campement et envoyées hors de Paris. En signe de protestation, elles ont bloqué une rue d’Aubervilliers. La situation a dégénéré et la police a lancé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule.
Reza Jafari promet qu’il ne cessera pas de se battre pour les exilés tant que tous ne seront pas hébergés. Pourtant, le jeune Afghan ne cache pas sa hâte de reprendre ses activités au sein de son association et de poursuivre son projet de centre culturel afghan dont l’ouverture à Paris a été contrariée par l’épidémie de Covid-19.
Cet ardent défenseur du dialogue inter-communautaire et de la paix se voit bien aussi rentrer en Afghanistan dans une dizaine d’années "pour créer un parti politique ou quelque chose comme ça".
Pour le moment, c’est en France que des Afghans ont besoin de lui. (...)