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Numérique : cette empreinte écologique que les consommateurs ont bien du mal à voir
Article mis en ligne le 23 janvier 2014
dernière modification le 20 janvier 2014

L’économie virtuelle consomme une énergie bien réelle. Les « data centers », qui regroupent les serveurs indispensables à la navigation sur le Web et à la circulation des 300 milliards de courriels, pourriels, photos ou vidéos envoyés quotidiennement, peuvent consommer autant d’énergie qu’une ville de 200 000 habitants.

Sans compter le coût environnemental de la fabrication d’équipements toujours plus nombreux. De quoi relativiser l’apport apparemment écologique de l’économie dématérialisée, avec ses « télé-réunions », son commerce en ligne ou ses téléchargements. (...)

Le poids de la Toile dans la consommation énergétique mondiale pourrait paraître négligeable aux côtés de celui des transports ou du chauffage. « A l’échelle mondiale, les data centers représentent 1,5% de la consommation électrique, soit l’équivalent de la production de 30 centrales nucléaires », rappelle cependant Fabrice Flipo, co-auteur de La face cachée du numérique. L’Europe abrite environ sept millions de serveurs. Google en possède à lui seul près de 900 000. Ceux-ci sont regroupées par centaines ou milliers dans des data centers, dont le plus gros consomme autant qu’une ville de 200 000 habitants. « Avec l’essor spectaculaire du stockage en ligne, ces chiffres sont appelés à croître sans cesse, précise Fabrice Flipo. La production de données pourrait être multipliée par 50 dans le monde d’ici à 2020 ».

Réduire la part des énergies fossiles

Greenpeace, qui fait partie des rares organisations qui travaillent sur l’impact environnemental des technologies de l’information et de la communication (ou TIC) [3], a rappelé à leurs responsabilités les géants du secteur : Apple, Microsoft, Google, Facebook et Amazon. Elle leur a demandé de réduire la part des énergies fossiles dans la production d’électricité nécessaire au fonctionnement de leurs fermes de données. C’était en 2010.

Trois ans plus tard, et suite aux pressions de centaines de milliers d’internautes, les mastodontes du net ont apparemment accompli de vrais progrès, quelles que soient leurs motivations réelles, écologiques ou financières. (...)

l’extraction de silicium, utilisé pour fabriquer les écrans de portables et d’iPad nécessite beaucoup d’eau, ce qui oblige les riverains des mines à s’approvisionner beaucoup plus loin. Quand aux 180 étapes parcourues par nos puces, elles sont très coûteuses en énergie. Pour une puce de 2 grammes, il faut brûler une quantité de combustibles fossiles plusieurs centaines de fois supérieure à ce poids. Rallonger la durée de vie des équipements de haute technologie, ou faire en sorte qu’ils soient réutilisés, amoindrirait leur impact environnemental. (...)

« Actuellement, les appareils sont renouvelés tous les 18 mois en moyenne, alors que leur durée de vie technique est de 7 à 8 ans », déplore Fabrice Flipo. Qui relève que « côté consommateur, les TIC ne sont pas perçues comme étant un problème, au contraire. Nous avons l’impression que cela consomme très peu au regard des services rendus. Le coût écologique est invisible ». « Nos sociétés restent fondamentalement basées sur la croissance. Or, s’il y a un secteur en croissance en ce moment, c’est bien celui des TIC », renchérit Françoise Berthoud. « On essaie donc de le mettre en avant, et d’en souligner les avantages, on maximise leurs effets positifs, et on omet le reste. »

« On ne cesse par exemple de s’extasier sur les progrès en terme de consommation électrique de chacun de nos petits gadgets [7], en oubliant ce que l’on appelle "l’effet rebond". » L’effet rebond ? C’est quand les progrès réalisés en matière de performance énergétique d’un bien sont annulés par la quantité croissante de biens consommés. Voire même lorsque cela annule les efforts réalisés dans d’autres secteurs. (...)

Au quotidien, on peut penser à éteindre ses équipements, précise Françoise Berthoud. Éviter les écrans de veille en 3D qui consomment beaucoup, ou encore taper directement l’adresse url plutôt que de passer systématiquement par Google. Lequel doit, pour donner une réponse rapide, dupliquer le web tout entier sur ses deux millions de serveurs ! Autre source d’économie potentielle : la rationalisation de l’usage des mails, parmi lesquels on compte entre 80 et 90% de spams. Envoi, stockage et tri de ces « pourriels » engendrent d’importantes émissions de gaz à effet de serre (GES).

« Le poids environnement pourrait aussi être revu à la baisse avec le recyclage » (...)

« Dans le domaine de l’exigence environnementale vis-à-vis des TIC, les contre-pouvoirs sont faibles », regrette Françoise Berthoud. On compte quelques ONG, et de petits groupes indépendants, rares et assez faibles. Leur puissance de frappe est infiniment moindre que celle des poids lourds du secteur. Le discours est donc assez déséquilibré et peu d’actes sont réellement posés. Le récent échec de tentative d’encadrement de l’obsolescence programmée, sur lequel le groupe EcoInfo avait travaillé, illustre parfaitement ce rapport de force très favorable aux industriels. (...)