
Human Rights Watch détaille les exactions de Boko Haram contre les filles scolarisées et/ou chrétiennes au Nigéria. Et dénonce le fait que les seules les rescapées de l’enlèvement massif de Chibok soient soutenues.
(...) la « tragédie de Chibok » ne doit pas faire oublier les autres victimes de Boko Haram. C’est le message que lance l’ONG Human Rights Watch (HRW).
Dans la foulée de la campagne #BringBackOurGirls, les autorités nigérianes, avec des soutiens internationaux, ont affecté des fonds pour les 57 lycéennes de Chibok qui ont pu s’échapper. Mais aucune des rescapées d’autres enlèvements interrogées par HRW « n’avait reçu ou n’avait connaissance de soins médicaux ou psychologiques financés par le gouvernement », souligne l’ONG dans un rapport publié lundi 27 octobre : « “Ces semaines horribles passées dans leur camp” : Les violences de Boko Haram contre les femmes et les filles dans le nord-est du Nigeria ». (...)
« Maintenant, le gouvernement nigérian et ses alliés doivent intensifier leurs efforts pour mettre un terme à ces enlèvements violents et apporter une aide médicale, psychologique et sociale aux femmes et filles qui ont réussi à s’échapper », insiste Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch.
Violences physiques et psychologiques
Selon les 30 témoignages de rescapées recueillis par HRW, les femmes et les filles enlevées par Boko Haram sont ciblées pour deux raisons principales : parce qu’elles vont à l’école, et/ou parce qu’elles sont chrétiennes. Une lycéenne de 19 ans a par exemple raconté comment elle a été enlevée avec cinq autres élèves en se rendant à l’école en janvier dernier. Elles ont été relâchées deux jours plus tard, « après avoir prétendu être musulmanes et promis de ne jamais retourner à l’école. Les jeunes femmes ne sont pas retournées à l’école, venant gonfler le nombre déjà important d’étudiantes ayant abandonné l’école secondaire dans le nord-est du Nigeria », déplore HRW.
Lire aussi : Au Nigeria, l’appel de Malala face à la "guerre contre l’éducation"
Les filles et les femmes interrogées ont expliqué que, pour avoir refusé de se convertir à l’islam, « elles et de nombreuses autres qu’elles ont vues dans les camps ont subi des violences physiques et psychologiques ». Certaines ont été contraintes de participer à des opérations militaires, ont été mariées de force. De nombreuses filles sont violées, la plupart du temps suite aux mariages forcés. Sur les 30 filles et femmes rencontrées par l’ONG, 3 ont été témoins de viol et 5 en ont été victimes. (...)
Outre ces enlèvements, qui concernent aussi des garçons, Human Rights Watch estime que, depuis 2009, plus de 7 000 civils ont été tués (dont au moins 4000 depuis mai 2013) dans les centaines d’attaques menées par Boko Haram dans le nord-est du Nigeria et dans la capitale fédérale, Abuja. L’ONG évoque un état de guerre, en mettant également en cause les forces de sécurité nigérianes, qui usent de leur côté « d’une force excessive, incendient des maisons, maltraitent physiquement les résidents, ont fait ’disparaître’ des victimes et procèdent à des exécutions sommaires de personnes suspectées de soutenir Boko Haram ».