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Néolibéralisme et guerre civile
/Dardot, Guéguen, Laval, Sauvêtre, Le choix de la guerre civile. Une autre histoire du néolibéralisme, Lux, 2021.
Article mis en ligne le 21 novembre 2021
dernière modification le 20 novembre 2021

« Il y a une lutte des classes, bien sûr, mais c’est ma classe, celle des riches, qui fait la guerre. Et nous gagnons. » Ces mots passés à la postérité sont du milliardaire Warren Buffett. Pour aller au-delà de la formule-choc, il est judicieux de lire « Le choix de la guerre civile. Une autre histoire du néolibéralisme ».

Le néolibéralisme n’est pas un ultra-libéralisme rêvant d’un Etat minimal, il ne signe pas le retrait de l’État de la sphère économique, il refuse le laissez-faire. Il redéfinit en fait la mission essentielle de l’Etat : protéger le marché de tout ce qui peut l’altérer.

Dans le viseur des penseurs néolibéraux (Hayek, Lippman et autres Röpke), il y a les gouvernements progressistes et leurs politiques sociales, les masses rêvant de justice, l’Etat-providence, le syndicalisme, le socialisme sous toutes ses formes, le protectionnisme économique, et bien sûr la démocratie soumise à la versatilité des humeurs populaires ! Un Etat fort, protecteur du marché libre, garantissant la liberté du capital, ne peut avoir que leur préférence.

Certains sont de fieffés réactionnaires, défenseurs de la famille patriarcale, de la religion, de la hiérarchie sociale, d’autres mettent davantage en avant l’individu-consommateur, libre et autonome, mais tous se rejoignent sur l’idée de faire la guerre, une guerre civile donc, contre toutes les forces de contestation sociale, contre les digues, fruits de la lutte des classes, qui empêchent la pensée néolibérale d’envahir la société. Il leur faut donc, au nom de la liberté individuelle contre une égalité castratrice, briser les bras et conquérir les têtes, liquider par exemple la puissance d’action des syndicats, et mettre au pas les sciences sociales, transformer la force de travail en capital humain, rappeler à toutes et tous qu’il n’y a pas d’alternative et qu’il revient à chacun de faire sa vie. (...)

Le néolibéralisme est une machine de guerre. Son interventionnisme est social, politique et culturel, sa logique ne peut être qu’autoritaire. Mais, nous disent les auteurs, n’assimilons pas autoritarisme et régime autoritaire. L’un peut aller sans l’autre, et le néolibéralisme n’a nul besoin de liquider physiquement et massivement ses opposants comme le fit Pinochet en son temps pour s’imposer. Le macronisme nous en administre la preuve régulièrement.