
Tatiana Pliouchtch est décédée samedi 5 novembre à Bessèges, dans les Cévennes. Dans les années 1960 et 1970, elle avait combattu pied à pied le KGB et obtenu la libération de son mari, Léonide Pliouchtch, interné en hôpital psychiatrique. Par un activisme sans compromis, cette intellectuelle ukrainienne réussissait à faire plier le régime. Portrait.
Les Pliouchtch ont été un couple au cœur de la dissidence soviétique (lire ici notre série « Figures de la dissidence soviétique »). Tous les deux sont ukrainiens et se rencontrent à Odessa à la fin des années 1950. Elle, alors âgée de 22 ans, est directrice d’une école maternelle. Léonide a quant à lui un premier poste d’enseignant dans une école rurale et découvre l’immense misère de la campagne ukrainienne.
Les deux jeunes gens iront ensuite à Kiev et entreront progressivement en dissidence. Leur combat est celui de beaucoup d’autres mais avec deux particularités. La première est que Léonide Pliouchtch va incarner à partir de 1972 la monstruosité de la « psychiatrie répressive » mise en place par le régime soviétique. Son internement devient une affaire internationale, et après des années de mobilisation (lire ici notre récit), le couple et leurs enfants sont autorisés à partir à l’étranger. Ils arrivent à Paris en janvier 1976.
L’autre particularité de leur dissidence est leur découverte de la culture et de la question nationale ukrainiennes. « Avec Léonide, nous avons rencontré les multiples groupes nationalistes ukrainiens. Déjà, on parlait d’indépendance. Et puis, j’aime beaucoup la langue ukrainienne », nous disait Tatiana Pliouchtch en juin 2020. Le couple a suivi avec passion les deux révolutions du Maïdan en 2004 et 2014, et est retourné régulièrement à Kyiv (Kiev) après l’indépendance de l’Ukraine en 1991. Leur dernier voyage date de 2014. Léonide a écrit de nombreux textes sur les mouvements démocratiques. Tatiana entretenait un réseau de multiples contacts.
Nous avions rencontré Tatiana Pliouchtch en juin 2020 dans sa maison de Bessèges. Passionnée de littérature ukrainienne, cette ancienne linguiste avait une parole toujours acérée, déterminée, expliquait-elle, à « toujours choisir sa vie ». (...)
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Léonid Pliouchtch nous a quittés. Divers hommages lui sont rendus dans les médias, qui relatent son combat de dissident contre le totalitarisme soviétique, les répressions qu’il subit, la souffrance de l’ultime et tragique épreuve de l’enfermement psychiatrique, mais aussi son courage et sa résistance, sa lucidité politique intacte, et sa volonté de fer.
Qu’on me permette un mot sur l’autre versant de L’affaire Pliouchtch , la lutte mondiale de ceux qui ont réussi à bousculer le pouvoir totalitaire de Moscou en lui arrachant la libération de ce mathématicien rendu politiquement trop encombrant . (...)