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Le Monde
Michèle Audin : « On a trouvé des ossements de communards dans le sous-sol de Paris jusque dans les années 1920 »
Article mis en ligne le 19 mars 2021
dernière modification le 18 mars 2021

Dans « La Semaine sanglante. Mai 1871, légendes et comptes », la mathématicienne et écrivaine entreprend de réévaluer le nombre des victimes de l’écrasement de la Commune.

(...) Comment en êtes-vous arrivée à écrire sur la « semaine sanglante » ?

Pour les personnes de ma génération qui, comme moi, ont été élevées dans une famille communiste, la Commune de Paris fait partie du patrimoine génétique. J’avais 17 ans la première fois que je me suis rendue au mur des Fédérés [lieu de commémoration dans le cimetière du Père-Lachaise, à Paris]. C’était à l’occasion du centenaire, en 1971. Ça m’a marquée. Puis, à partir de 2014, je me suis beaucoup documentée pour écrire mes deux romans sur la Commune.

Or, plus je m’y intéressais, plus je me rendais compte que, si nous savons que ces quelques semaines d’espoir se sont terminées par un massacre, personne ne sait exactement ce qui s’est passé ni combien de personnes ont été tuées, notamment lors de la « semaine sanglante ». Le moindre des respects qu’on leur doit, c’est de ne pas les laisser disparaître encore une fois. J’ai repris le décompte des morts, de façon sérieuse, en faisant état de toutes les sources que j’ai pu trouver. (...)

Pourquoi ce décompte reste-t-il un sujet polémique ?

Dès le 2 avril 1871, le gouvernement installé à Versailles mène une guerre meurtrière contre cette révolution. Pendant la « semaine sanglante », chacune de ses avancées dans Paris est suivie de massacres dans les quartiers conquis. Les vainqueurs se sont empressés d’écrire l’histoire de l’événement, ce qu’ont fait aussi quelques-uns des vaincus. Mais l’état de certaines sources en dit long sur les édulcorations et les falsifications effectuées dès juin 1871 par le pouvoir.

Une utilisation rigoureuse de ces sources montre que le nombre des inconnus inhumés dans les cimetières parisiens n’est pas de 6 500, comme l’a dit, vers 1879, l’historien « versaillais » Maxime Du Camp [1822-1894], mais d’au moins 10 000. Elle confirme aussi que de nombreux corps ne sont jamais arrivés dans ces cimetières

(...) des évaluations plus hautes, autour de 15 000 ou 20 000 morts, ne sont pas exagérées. (...)