Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Slate.fr
#MeToo : à force de « mais », on n’avance pas
Titiou Lecoq
Article mis en ligne le 3 mars 2018
dernière modification le 2 mars 2018

Depuis des semaines, dès que j’allume la radio, la télé ou l’internet, j’entends les mêmes phrases répétées à l’infini : « #MeToo c’est très bien... MAIS ».

MAIS il faut faire attention. MAIS ça va trop loin. MAIS les réseaux sociaux ne doivent pas être un tribunal populaire. MAIS il faut laisser la justice faire son travail. MAIS il y a des femmes qui mentent. MAIS il y a des femmes qui se victimisent. MAIS il y a des hommes qui sont persécutés. MAIS la séduction.

Arrivée au point « séduction », en général, je sucre mon café avec un comprimé de valium, en me demandant si je vis sur la même planète que les personnalités qui se répandent dans les médias, toutes pétries d’inquiétudes face aux hordes féministes qui terrorisent le pays.

Sur ma planète à moi, ça ne va pas trop loin : ça ne va nulle part

Il ne se passe rien. Je cherche des exemples d’hommes dont la vie professionnelle et personnelle aurait été ébranlée par des accusations, mensongères ou pas. Je n’en vois aucun. Quel homme a été cloué au pilori du féminisme vengeur ?

Prenons les cas les plus connus sur lesquels on prétend que les féministes enragées, comme moi, s’acharnent : la promo du dernier film de Woody Allen s’est bien passée, Roman Polanski devrait être un personnage du prochain film de Tarantino, Bertrand Cantat est en tournée (le 29 mai prochain il sera à l’Olympia et c’est déjà complet), Gérald Darmanin est toujours ministre de la République, Nicolas Hulot n’a pas perdu un point dans les sondages de popularité et reste le politique le plus apprécié des Français, le journaliste de LCP, Frédéric Haziza, qui était accusé d’agression sexuelle, a réintégré son poste et son accusatrice a démissionné, la cagnotte « Free Tariq Ramadan » a dépassé les 100.000 euros en quelques jours.

Dans les médias, je ne peux citer qu’un cas où il s’est passé quelque chose. Patrice Bertin, célèbre voix de France Inter, mis en cause par plusieurs journalistes pour harcèlement et tentative de viol, est parti en retraite anticipée en novembre dernier. Je ne vais pas me prononcer sur ces cas, au demeurant forts différents les uns des autres. J’aimerais simplement qu’on se rende compte du décalage entre un discours général du « ça va trop loin » et le réel. (...)

Ce mouvement dit quelque chose de notre société, et ce n’est pas la justice qui va changer la société. La justice s’occupe du cas particulier, le reste, l’addition de ces cas, c’est notre problème à tous. À nous de regarder la somme en face.

Tous ces arguments qui suivent le « MAIS » sont une vaste mascarade.

Arrêtez de vous cacher derrière l’institution judiciaire ou la peur de la censure pour ne surtout pas réfléchir à tous les comportements au quotidien qui ne vont pas, à toutes les inégalités qu’on accepte et qu’on nourrit, à tous les stéréotypes qui font passer pour acceptable ce qui ne devrait pas l’être.