Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Reporterre
Magnifique et troublant, un livre sur l’ignorance de l’homme face à la nature
Un an dans la vie d’une forêt, de David Haskell, éd. Flammarion, 336 pages, 21,90 €.
Article mis en ligne le 7 mai 2014
dernière modification le 30 avril 2014

Un an dans la vie d’une forêt, de David Haskell, est un livre magnifique qui décrypte l’immensité du monde à partir d’un mètre carré de forêt. On y apprend mille choses sur la nature, mais l’essentiel est dans la question troublante que pose Haskell sur la limite des connaissances humaines.

(...) Le livre refermé, on songe à Jacques-Henri Fabre et à son monumental ouvrage Souvenirs entomologiques. David Haskell est le Jacques-Henri Fabre de ce début du 21ème siècle. Comme son lointain prédécesseur français, ce sont les portes d’un monde vivant aussi foisonnant que méconnu, qui vole, se tortille, creuse, gratte, rampe, pousses ses racines, s’infiltre au cœur des cellules dont David Haskell ouvre les portes pour le plus grand plaisir du lecteur.

L’idée de départ du livre est simple. L’auteur, un universitaire américain de quarante-cinq ans, biologiste de formation, a choisi d’observer pendant une année « un carré de feuilles, de cailloux et d’eau, un espace d’un mètre de diamètre, équivalent en taille aux mandalas circulaires des moines tibétains » en s’imposant quelques règles simples : « Venir le plus souvent possible, y observer le jeu des saisons, garder le silence, ne rien prélever, ne rien déplacer, effleurer peut-être, et patiemment me fondre dans le microcosme ». (...)

On apprend beaucoup en lisant le livre, que la lumière verte émise par les lucioles sert autant à attirer des partenaires sexuels qu’à en faire fuir d’autres, que des extraits de plantes figurent dans une ordonnance médicale sur quatre, que le poids d’une chenille au cours de sa vie est multiplié par deux mille à trois mille, que la voltige des samares d’érables a peu à voir avec celle des tulipiers et des frênes et que cela ne doit rien au hasard…

Mais l’essentiel est ailleurs. Il réside dans une idée qui court tout au long du livre, celle de l’ignorance abyssale de l’homme face à la nature. (...)

« Au fil de mes observations, la conscience de l’énormité de mon ignorance s’est imposée à moi. Je suis bien incapable ne serait-ce que d’énumérer et de nommer les habitants du mandala. La compréhension de leurs modes de vie et de leurs relations est impossible de façon autre que fragmentaire. Plus j’observe, conclut l’auteur, plus s’éloigne l’espoir de comprendre le mandala, de saisir sa nature la plus fondamentale ». Y parviendra-t-on un jour ?

Le résultat est magnifique (...)