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La vie des idées
Les jeux vidéo, sociologie d’un loisir de masse
Article mis en ligne le 22 novembre 2020
dernière modification le 21 novembre 2020

Les jeux vidéo sont la plus jeune des industries culturelles. Ils sont devenus, avec la massification de leur pratique au cours des années 2000, l’un des loisirs les plus répandus dans les pays industrialisés. Il s’agit d’une industrie culturelle importante, avec un chiffre d’affaires estimé à 5 milliards d’euros en France, plus que la musique enregistrée ou le cinéma. Le succès des jeux vidéo auprès du grand public s’est accompagné d’une série de controverses et de scandales toujours vivaces. Les années 1990 furent marquées par des débats sur les dangers des représentations de la violence dans les jeux vidéo ; les années 2000 par des dénonciations du caractère addictif des jeux vidéo en ligne. Ces deux problèmes publics sont encore d’actualité : aux États-Unis, chaque tuerie de masse réactive la question de la violence des jeux vidéo. Désormais, les tensions les plus fortes dans le débat public se situent autour de la misogynie, du racisme, de l’hétéronormativité, et plus largement de la fermeture de ce monde.

Les jeux vidéo sont rarement considérés par les sciences sociales. Il s’agit en effet d’un loisir numérique : or, la technique, notamment les techniques d’information et de communication, embarrassent les sociologues (Dagiral et Martin 2017), et les loisirs, objet de débat central de la sociologie il y a encore quelques décennies (Dumazedier 1962 ; Bourdieu 1979), font désormais l’objet de peu d’enquêtes.

Dans cet essai, je propose, à partir d’une synthèse de travaux menés en France et à l’international, un éclairage de trois problématiques centrales et interconnectées que posent les jeux vidéo.

  1. Une première interrogation sur les publics contemporains du jeu met en évidence l’omniprésence de ce loisir, mais la massification de la pratique s’accompagne d’une différenciation importante, un indice supplémentaire des inégalités persistantes d’usage du numérique (Pasquier 2018).
  1. Ensuite, l’examen de la dynamique d’intégration de l’industrie des jeux vidéo met en lumière une tension fondamentale entre l’autonomie des sous-cultures fans et le contrôle croissant exercé par les industries culturelles.
  1. Enfin, malgré la massification des publics, l’image dominante du joueur demeure jeune et masculine. Les jeux vidéo se caractérisent par des mouvements sociaux masculinistes défendant une exclusivité du médium. La troisième partie de l’article examine ces mouvements et leurs conséquences sur les pratiques féminines des jeux. (...)