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IRIN - nouvelles et analyses humanitaires
Le système de réinstallation des réfugiés perturbé par le décret de Trump
Article mis en ligne le 8 février 2017

Les gestionnaires des organismes de charité et les défenseurs des réfugiés croient que le réseau d’organisations sans but lucratif qui gère la réinstallation des réfugiés aux États-Unis mettra des années à se remettre des changements annoncés par le président Donald Trump.

La suspension du programme d’admission pendant 120 jours et la diminution du nombre d’arrivées de 110 000 à 50 000 pendant l’année fiscale 2016-2017 auront ainsi de profondes répercussions. Le système de réinstallation n’est pas « un robinet que l’on peut ouvrir et fermer à notre guise », estime la défenseure des réfugiés Amy Slaughter. D’après elle, le programme est confronté à une « menace existentielle ».

La suspension affecte 67 689 réfugiés qui avaient déjà obtenu l’autorisation du département américain de la sécurité intérieure et qui étaient considérés comme « prêts à voyager ». Après la reprise du programme, qui devrait avoir lieu à la fin mai, seulement 20 000 réfugiés pourront être admis jusqu’à la fin du mois de septembre en vertu du nouveau quota de 50 000 (30 000 réfugiés ont été admis avant l’investiture de Trump). Les autres resteront dans l’incertitude, selon Mme Slaughter, administratrice en chef des opérations de RefugePoint, une organisation de défense des droits des réfugiés basée aux États-Unis. Cela inclut 13 928 Somaliens, 10 680 Irakiens, 8 886 Syriens, 1 805 Soudanais, 983 Iraniens et 29 Yéménites. Nombre d’entre eux devront sans doute refaire les longues démarches leur permettant d’obtenir les autorisations de sécurité et de santé nécessaires, car celles-ci expirent après un délai relativement court. Le processus d’approbation de la réinstallation prend rarement moins de deux ans. « Désormais, les réfugiés devront peut-être attendre deux années de plus pour être admis sur le territoire », a dit Mme Slaughter. (...)

Continuer de verser le salaire des centaines d’employés des ONG pendant la suspension (ou décider à quel moment leur donner leur préavis de licenciement) est un « gros problème », a dit M. Canny, dont l’organisation travaille avec 80 organismes de charité catholiques. « Ce sont tous des organismes sans but lucratif qui n’ont pas de grosses réserves de liquidités », a-t-il dit à IRIN.

Le Comité international de secours (International Rescue Committee, IRC), une ONG géante, est l’un des organismes de réinstallation les mieux connus. Les huit autres organismes, qui affichent des revenus annuels moyens inférieurs à 80 millions de dollars, sont cependant plus représentatifs. D’après un examen de leurs déclarations fiscales fait par IRIN, le groupe dépend fortement des fonds alloués par le gouvernement. (...)

La droite conservatrice est préoccupée par les coûts, les risques sécuritaires et l’impact démographique de la réinstallation des réfugiés sur le territoire américain. Ses arguments semblent par ailleurs trouver écho auprès de la nouvelle administration américaine. Or, même ceux qui sont en faveur de l’engagement des États-Unis sur les questions de réfugiés ne disent pas que le système est parfait. Selon certains, le mode de financement, le besoin d’un système de parrainage privé et l’absence de visas permettant aux réfugiés de travailler et d’étudier sont tous des éléments qui méritent qu’on s’y attarde. Ces petits ajustements ont cependant été mis de côté pour le moment. « Ce n’est probablement pas le moment de faire des critiques sur des détails… alors que nous nous battons pour la survie du programme », a dit Mme Slaughter. Selon les organismes de réinstallation, des dizaines de milliers de nouveaux réfugiés potentiels ont vu leurs espoirs déçus, des centaines d’emplois américains et des dizaines d’organisations sans but lucratif sont menacés et l’influence et la réputation des États-Unis à l’étranger risquent d’être durement atteintes. (...)

Depuis 1975, le programme de réinstallation des réfugiés a permis d’accueillir quelque trois millions de personnes aux États-Unis. « C’est un programme humanitaire… qui sert au mieux les intérêts des États-Unis », a dit Eskinder Negash, vice-président senior de l’USCRI. (...)

Malgré le coût élevé du programme – plusieurs centaines de millions de dollars par année –, le décret de M. Trump, qui interdit temporairement l’accès au territoire américain aux citoyens de sept grands pays musulmans, semble avoir suscité une vague de soutien populaire pour les réfugiés. (...)