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Attac33 Le Ptitgrain n°458
Le petit garçon de Donald Trump
jean-Luc Gasnier
Article mis en ligne le 1er mai 2018

En politique étrangère, peut-être encore davantage qu’ailleurs, on ne discute pas qu’avec ses amis et il est sans doute nécessaire d’emprunter des chemins détournés et de faire preuve de patience et d’obstination pour atteindre ses objectifs. Mais, pour avoir du poids et gagner la confiance des autres pays sur la scène diplomatique, sans doute convient-il de respecter ses engagements internationaux, de signer et de mettre en œuvre des traités susceptibles de favoriser la paix entre les peuples et la préservation de notre environnement et de nouer pour cela des relations privilégiées avec des partenaires sûrs et fiables. . .

La récente visite d’Etat d’Emmanuel Macron aux USA aura de ce point de vue envoyé un signal bien ambigü, mais finalement prévisible et logique, à la communauté internationale.

En affichant ostensiblement son amitié « spéciale » avec Donald Trump, Emmanuel Macron prend le risque de s’engager dans un partenariat « hors norme » avec quelqu’un d’instable et d’impétueux qui ne remplit pas les critères de confiance minimum permettant de bâtir une relation équilibrée et porteuse d’avenir. Pour crédibiliser son action sur le plan diplomatique, il y a des interlocuteurs sans doute plus valorisants ! La presse officielle – il va falloir se résoudre à la désigner comme cela - et les communicants de l’Elysée ont eu bien du mal à nous vendre le spectacle des retrouvailles et des embrassades avec Donald Trump comme autant de preuves supplémentaires de l’habileté et de l’adaptabilité de notre Président. Emmanuel Macron a d’ailleurs paru parfois décontenancé et réellement dépassé par la tournure des évènements. La compagnie de Trump englue dans le vulgaire et déplace les lignes traditionnelles de ce genre de rencontre. Les convenances sont bousculées, malmenées et ce sont celles de Trump qui se sont imposées. Se voir tapoter gentiment le revers de la main ou gratifier de quelques chiquenaudes pour chasser des pellicules collées sur le veston en attendant d’être tiré devant les caméras comme un petit garçon pourrait être vécu par un président normal comme quelque chose d’ assez mortifiant ! Mais quand on aime. . .

Et, avec ces deux-là, le vieux dicton populaire « qui se ressemble s’assemble » prend en fait tout son sens.

Car, même si bon nombre de commentaires obligés tentent d’opposer la finesse et l’intelligence d’Emmanuel Macron à la rudesse et la vision à courte vue de Donald Trump, les deux présidents ont en commun l’essentiel. Ces deux libéraux autoritaires partagent les mêmes valeurs même s’ils ne les portent pas tout à fait de la même manière. Avec eux, c’est l’essence même du libéralisme qui se donne en spectacle. Les deux chefs s’apprécient et se congratulent mutuellement pour leur réussite individuelle. Ce sont les propagandistes, les apôtres d’un système qui exalte la compétition et l’ambition des individus, le plus souvent au détriment du collectif. Bousculer le système se limite chez eux à bousculer les autres pour obtenir une meilleure place au soleil. Avec Emmanuel Macron et Donald Trump, le capitalisme peut à nouveau réellement développer ce qu’il est : un mécanisme de domination et d’exploitation de l’homme et de la nature particulièrement redoutable, un système qui concentre la richesse et le pouvoir entre les mains d’une toute petite minorité de nantis pour lesquels tout est permis. Evidemment Emmanuel Macron met dans son discours plus d’hypocrisie et de retenue : il essaye d’habiller la force et la brutalité du chacun pour soi des habits soyeux de l’humanisme et du respect de l’autre. Il peut bien mettre en avant ses différences voire ses divergences avec son homologue devant le congrès américain mais, au final, le substrat profond de sa politique est la même et son discours ne peut guère abuser que quelques parlementaires démocrates ou républicains. Globalement, il se range au côté de Trump pour imposer un système mortifère.

Emmanuel Macron peut bien clamer devant la chambre des représentants qu’il n’y a pas de planète B mais la grande majorité de ses actes conduisent à mettre en péril et à fragiliser toujours plus la planète. Est-ce en harcelant les zadistes de NDDL qu’il pense réussir à promouvoir des expériences de production agricole réellement novatrices ?

Emmanuel Macron peut bien réclamer plus de justice internationale mais que fait-il par exemple pour protéger les palestiniens de la fureur criminelle de l’Etat israélien ?

Emmanuel Macron peut bien faire de la lutte contre le terrorisme islamique une priorité internationale mais croit-il y parvenir en nouant des relations privilégiées avec le Premier ministre israélien Netanyahu, avec le président égyptien Sissi ou bien encore avec le prince héritier d’Arabie Saoudite Mohammed ben Salmane et en multipliant les ventes d’armes au Moyen-Orient ?

Emmanuel Macron peut bien appeler à plus de solidarité mais que fait-il pour prendre une part honorable dans l’accueil des migrants ? Est-ce en criminalisant les actions des associations d’aide aux migrants qu’il compte exalter les valeurs d’hospitalité et d’entraide au sein de la population ?

Sur tous ces sujets, le décalage entre le discours et les actes de notre Président est abyssal.

Là où Emmanuel Macron est incohérent, Donald Trump a pour lui la force de la cohérence. Donald Trump ne peut que sortir gagnant de ses rendez-vous avec Emmanuel Macron.

Finalement, Emmanuel Macron est bien le petit garçon de Donald Trump.