
Branle-bas de combat dans les milieux patronaux. La réforme des retraites inquiète les entreprises qui emploient des cadres gagnant plus de trois plafonds de la Sécurité sociale, soit 120.000 euros par an. Alors que ceux-ci cotisent actuellement jusqu’à huit fois le plafond (329.000 euros) pour la retraite (à l’Agirc-Arrco), ce qui leur permet de toucher une pension élevée dans le système par répartition, il ne leur restera plus demain qu’une cotisation de solidarité déplafonnée de 2,81 % ne leur donnant aucun droit à retraite au-dessus de 120.000 euros de revenus. « Pour le top management, ça peut signifier un taux de remplacement à la retraite divisé par deux », remarque un représentant patronal, sidéré.
« On aura un problème d’employeur pour ces gens-là », « qui sont extrêmement mobiles » parce qu’« ils ont la chance d’être employés partout dans le monde », a alerté le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, mercredi, devant les députés de la commission spéciale sur les retraites de l’Assemblée , évoquant un « problème de compétitivité ».
Certes, la cotisation patronale va chuter de 16,68 % à 1,69 % sur cette tranche de revenus, avec de grosses économies à la clé. Mais les entreprises n’en profiteront pas forcément, car ces salariés devraient se tourner vers leur employeur pour obtenir des compensations. Ces augmentations, primes ou abondements risquent de leur coûter plus cher en fin de compte, parce que les entreprises devront payer des cotisations dessus, sans déductibilité fiscale. (...)
D’où la mobilisation qui s’est accentuée ces derniers jours des milieux patronaux. Une poussée de fièvre qui a surpris l’exécutif, alors que l’arbitrage sur le seuil des 120.000 euros date de plus d’un an, et que le Medef n’avait guère réagi (...)
Certaines fédérations professionnelles, telle la métallurgie (UIMM), vont jusqu’à réclamer le maintien du plafond de 329.000 euros pour les cotisations. S’alignant de facto sur la position de syndicats comme la CGC ou la… CGT. Cette dernière a d’autres motivations : elle veut préserver un système par répartition le plus large possible, afin de ne pas attirer les fonds de pension en France. (...)
la perspective d’une transition longue n’apaise pas les inquiétudes. « On ne fait pas disparaître le problème en l’étalant dans le temps. Passer de la répartition à la capitalisation, ça veut dire payer deux fois », met en garde une source patronale. Il faut en effet continuer à financer avec les cotisations d’aujourd’hui les retraites contemporaines (répartition), tout en commençant à alimenter son compte d’épargne-retraite pour l’avenir (capitalisation). « On ne peut pas passer à la capitalisation, ce n’est pas possible », a d’ailleurs martelé Geoffroy Roux de Bézieux devant les députés, sans aller jusqu’à demander le maintien du plafond des 329.000 euros. Du côté de l’exécutif, on y voit aussi une manoeuvre tactique alors que le patronat craint de voir les entreprises mises à contribution pour garantir le retour à l’équilibre des retraites. (...)