
Le 27 mars s’est tenu le Forum Parlementaire Mondial (FPM) à Tunis. Cet événement ouvert à tous les parlementaires qui partagent la charte de Porto-Alegre, et aux participants au FSM a démarré ses activités avec une session sur le thème « Contrer ensemble la dette, instrument de domination des peuples »
Dans un amphithéâtre rempli par 200 participants, Gabi Zimmer, président du groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL) et Hamma Hamami, président du Front populaire de Tunisie, co-organisateurs de cette manifestation ont donné le ton des débats. Hamami n’a pas hésité à qualifier « la dette d’arme de destruction des peuples ». Il rappelle que « la Tunisie emprunte actuellement pour rembourser les dettes de Ben Ali ». Le leader politique tunisien exige des parlementaires européens présents de faire pression sur l’Union européenne pour annuler la dette de la Tunisie (...)
Le poids de la dette tunisienne entrave la possibilité d’atteindre les objectifs de la révolution de janvier 2011. « La dette tunisienne ne représente rien pour ses créanciers mais pour le Tunisien ce sont des sommes astronomiques. 41 milliards de dinars (19,3 milliards d’euros) ont été empruntés par Ben Ali sur les vingt-cinq ans ». La Tunisie a déjà remboursé 48 milliards de dinars (22,7 milliards d’euros) de dettes. Pour ces raisons, le Front Populaire exige « l’annulation de la dette de Ben Ali ». Elle est une dette odieuse et/ou illégitime. Et Hamami de conclure sous le mot d’ordre : « Nous vaincrons en Tunisie contre la tyrannie, la dictature et l’obscurantisme ».
Perte de souveraineté
Après cette ouverture politique, le FPM a donné la parole aux députés mais aussi aux représentants des mouvements sociaux et organisations actives dans la lutte contre le « système dette ». Un premier panel a été consacré à la dette comme instrument de transfert des richesses du Sud au Nord, il a été modéré par Fathi Chamkhi (député tunisien, Front populaire).
D’entrée de jeu, le député grec Vassilis Chatzilabrou (Syriza) explique le vrai rôle de ce système (...)
Eric Toussaint (porte-parole du réseau CADTM) a tenu à rappeler que la lutte contre « le système dette » a une histoire. « Thomas Sankara et Fidel Castro ont appelé dès les année 80 à constituer un front uni pour le non-paiement de la dette. Après que les peuples d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et d’Europe de l’Est ont été soumis à des programmes d’ajustement structurel suite à la crise de la dette, aujourd’hui, l’épicentre de cette crise est en Europe », observe l’auteur de Bancocratie. Et d’ajouter : « Il faut un combat commun. Tunis est le symbole de la dette odieuse et illégitime contractée par Ben Ali soutenu par les créanciers français (Lagarde, ministre des Finances), le FMI (DSK, président du FMI à l’époque) ».
Le cas grec offre une illustration dramatique de l’application de ces politiques. La BCE, la Commission européenne, le FMI qui forment la Troïka, soutenue par l’Allemagne et la France ont fait subir à la Grèce un régime d’austérité brutal et injuste. (...)
En Grèce, une commission d’audit de la dette grecque vient d’être créée. Ses travaux commenceront en avril2. Cette initiative historique a été accueillie par des applaudissements dans la salle. Pour rappel, l’Équateur du président Raphael Correa avait initié un travail similaire. L’audit réalisé avait conclu à l’illégitimité de la dette et avait abouti à la suspension d’une partie de la dette et un refus de payer une part de celle-ci. C’est une victoire claire et nette contre les créanciers. Dans le cas grec, la commission d’audit servira à donner des arguments aux autorités grecques mais aussi aux peuples des autres pays pour l’annulation des dettes illégitimes. (...)
En fin de ce premier panel, une motion a été adoptée par les participants à ce Forum, ci-dessous son texte :
« Le Forum Parlementaire Mondial réuni à Tunis dans le cadre du Forum Social Mondial de 2015 déclare que la question de la dette est utilisée comme outil de domination sur les peuples par les forces du capital. Les problèmes actuels que rencontre la transition démocratique en Tunisie face à la dette en sont la preuve concrète.
Il soutient les demandes de constitution de comités d’audit sur la dette avec participation citoyenne, y compris les femmes, comme le processus qui a commencé au parlement grec et qui devrait être élargi à d’autres pays.
Il demande une évaluation de la dette coloniale dans les pays anciennement colonisés, et la rétrocession rapide des avoirs des dictateurs placés dans les banques du Nord et autres.
Il soutient l’appel des Nations-unies pour l’annulation de la dette des pays touchés par le virus Ebola.
Le Forum Parlementaire Mondial refuse l’application des politiques d’austérité qui étranglent les peuples, et se répercutent notamment sur l’emploi des jeunes et rendent les femmes encore plus vulnérables. »