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Lancement des Soulèvements de la Terre
Article mis en ligne le 16 mars 2021
dernière modification le 15 mars 2021

Cet appel est issu d’une rencontre récente sur la zad de Notre-Dame-des-Landes qui a réuni des personnes des quatre coins du pays : paysan.nes et paysannes, jeunes écologistes en révolte, habitant.e.s de zad et territoires en luttes, syndicalistes, chercheurs.euses engagés dans la défense du vivant. Appel à reprendre les terres, à bloquer les industries qui les dévorent, et annonce d’une première saison d’actions communes.

L’appel aux « soulèvements de la Terre » est issu d’une rencontre récente sur la zad de Notre-Dame-des-Landes qui a réuni des personnes des quatre coins du pays : paysan.nes et paysannes, jeunes écologistes en révolte, habitant.e.s de zad et territoires en luttes, syndicalistes, chercheurs.euses engagés dans la défense du vivant. Il est aujourd’hui rejoint par des centaines de fermes, collectifs, personnalités et soutiens signataires du texte :

"Nous sommes des habitant·es en lutte attaché·es à leur territoire. Nous avons vu débouler les aménageurs avec leurs mallettes bourrées de projets nuisibles. Nous nous sommes organisé·es pour défendre nos quartiers et nos villages, nos champs et nos forêts, nos bocages, nos rivières et nos espèces compagnes menacées. Des recours juridiques à l’action directe, nous avons arraché des victoires locales. Face aux bétonneurs, nos résistances partout se multiplient.

Nous sommes des jeunes révolté·es qui ont grandi avec la catastrophe écologique en fond d’écran et la précarité comme seul horizon. Nous sommes traversé·es par un désir croissant de déserter la vie qu’ils nous ont planifiée, d’aller construire des foyers d’autonomie à la campagne comme en ville. Sous état d’urgence permanent, nous avons lutté sans relâche contre la loi travail, les violences policières, le racisme, le sexisme et l’apocalypse climatique.

Nous sommes des paysan·nes. La France n’en compte presque plus. Avec ou sans label, nous sommes les dernier·es qui s’efforcent d’établir une relation de soin quotidien à la terre et au vivant pour nourrir nos semblables. Nous luttons tous les jours pour produire une nourriture saine à la fois financièrement accessible et garantissant une juste rémunération de notre travail.

Parce que tout porte à croire que c’est maintenant ou jamais, nous avons décidé d’agir ensemble. (...)

L’ère covid a achevé de rendre l’atmosphère irrespirable. Entassé·es dans des métropoles chaque jour plus invivables, confiné·es dans une existence hors-sol et artificielle, un sentiment d’étouffement nous étreint. Le coronavirus relève de la dévastation écologique, de l’exploitation globale de la terre et du vivant. Il dévoile notre totale dépendance à l’économie mondialisée, révèle la fragilité de cette fausse abondance étalée dans les rayons des supermarchés. La gestion gouvernementale a pour conséquence de reconfigurer l’économie (télé-travail, dématérialisation...) tout en abolissant nos libertés fondamentales (loi sécurité globale, régime d’exception...). (...)

De sensibilités, de parcours et d’horizons très différents, un constat commun nous rassemble :

1 - La question foncière est à la croisée de la fin du monde et de la fin du mois, de la planète des écologistes et de la terre des paysans. Dans les dix ans à venir, la moitié des exploitant·es agricoles de France va partir à la retraite. Concrètement, près d’un tiers de la surface du territoire national va changer de main. C’est le moment ou jamais de se battre pour un accès populaire à la terre, pour restaurer partout les usages et les égards à même d’en prendre soin.

2 - Quoi qu’on puisse en penser ou en attendre, l’État laisse le champ libre au ravage marchand de la terre. Il organise le contournement des régulations foncières et environnementales qu’il a lui même instituées. En guise de verdissement publicitaire, Macron rebondit sur la proposition de la convention citoyenne sur le climat d’organiser un referendum pour "inscrire la défense de l’environnement dans la constitution". Mais le même refuse d’interdire glyphosate et néonicotinoïdes. Le même s’apprête à bétonner à tour de bras en vue des JO de 2024. Il est grand temps d’établir un rapport de force pour faire redescendre l’écologie sur terre.

3 - Nos luttes comme nos alternatives sont absolument nécessaires mais, séparées les unes des autres, elles sont impuissantes. Syndicalisme paysan, mouvements citoyens, activismes écologiques, agitations autonomes, luttes locales contre des projets nuisibles, ne parviennent, seuls, à renverser la situation. Il est nécessaire d’unir nos forces pour impulser et inventer des résistances nouvelles, à la mesure du ravage auquel nous assistons stupéfait·es. (...)

Nous voulons faire advenir des soulèvements pour la défense de la terre comme bien commun. Nous voulons arracher des terres à l’exploitation capitaliste pour constituer des espaces libérés, propices à une multiplicité d’usages communs, de relations et d’attachements. Nous voulons défendre le monde vivant grâce à une agroécologie paysanne et solidaire, à la protection des milieux de vie et à une foresterie respectueuse. Cela commence par trois gestes :

1- Pour faire cesser le ravage, nous appelons à enclencher le frein d’urgence, à concentrer nos forces pour cibler, bloquer et démanteler trois des industries toxiques qui dévorent la terre : celles du béton, des pesticides et des engrais de synthèse. Nous nous retrouverons en juin et à l’automne pour des grosses actions de blocage d’industrie. (...)

2 - Remettre la terre entre nos mains et l’arracher des griffes des accapareurs exige que nous soyons chaque jour plus nombreux à remettre les mains dans la terre. (...)

3 - Pour restituer aux habitant·es et aux paysan·nes de chaque localité le pouvoir de décider de l’attribution, l’usage et la destination des terres, nous appelons à s’introduire en masse, chaises en main, dans les diverses institutions et lieux de pouvoir où se décide sans nous le devenir de la Terre (...)

La première saison des soulèvements de la Terre sera marquée par une première vague d’occupations de terres et de blocages contre le bétonnage : 27 mars aux Vaites à Besançon (jardins populaires vs extension urbaine), les 10 et 11 avril à Rennes à la Prévalaye (cultures collectives vs métropole), les 22 et 23 mai au Pertuis en Haute-Loire (paysans expropriés vs construction d’une déviation routière), les 19-20-21 juin à St-Colomban en Loire-Atlantique (défense du bocage menacé par les carrières de sable et le maraîchage industriel), au cours du printemps sur le plateau de Saclay dans l’Essonne (terres agricoles vs technopole), à partir du 29 juin (semaine d’actions de blocages d’envergure et simultanées ciblant l’industrie de la construction et du Grand Paris). Les 3-4 juillet, un grand rassemblement festif aura lieu pour célébrer la fin de la saison 1 sur des terres à défendre en Île-de-France

La seconde saison des soulèvements de la Terre s’ouvrira en septembre par une marche populaire jusqu’aux portes du ministère de l’agriculture et de l’alimentation à Paris. Elle sera prolongée tout au long de l’automne et de l’hiver par des actions de réappropriation dans les institutions et des blocages des industries qui empoisonnent les terres.

Le programme détaillé de chacune de ces mobilisations est disponible sur lessoulevementsdelaterre.org (...)