
Le Pacifique, ses récifs de coraux, ses atolls paradisiaques… Et la montée des océans qui menace déjà quatre millions d’insulaires. Le président des Maldives a bien lancé l’alerte il y a déjà vingt ans. En vain. Alors que s’ouvre le 20 juin, à Rio, au Brésil, une nouvelle conférence des Nations unies pour le « développement durable » sur fond de dérèglement climatique, Basta ! a été recueillir les points de vue d’habitants, de chercheurs ou d’associations en Polynésie française, à l’occasion du Festival international du film documentaire océanien.
Avec le changement climatique, la montée des eaux pourrait submerger les Kiribati, tout comme d’autres îles coralliennes océaniennes, d’ici à la fin du siècle. Pour Maria, il y a urgence. Elle sait que sur son île natale les digues de fortune sont peu à peu grignotées, inlassablement, et qu’il faut en construire de nouvelles, toujours plus proches des habitations. Elle le constate à chaque fois qu’elle revient y visiter sa famille. (...)
Maria Tiimon sait que cette situation est due au réchauffement climatique. Nous sommes en 2009. Nous la suivons durant plusieurs mois grâce au documentaire The Hungry Tide (littéralement : « la marée affamée ») réalisé par Tom Zubrycki. Maria Tiimon accepte la mission de se rendre à la Conférence des Nations unies sur le changement climatique pour expliquer ce que vit sa nation devant la communauté internationale. En vain. Rien de concret ne débouchera du sommet de Copenhague. Trois ans plus tard, c’est une nouvelle conférence pour le « développement durable » qui va débuter à Rio, ce 20 juin. Et l’urgence est toujours là. (...)
la hausse du niveau de la mer est un sujet de préoccupation majeur des pays insulaires du Pacifique. « Les dernières données disponibles montrent que cette hausse, très variable d’une région à l’autre, s’est effectuée au rythme de 1,2 centimètre par an sur les vingt dernières années dans la région du Pacifique oriental. D’ici à 2100, elle pourrait être de 50 centimètres à un mètre », annoncent les actes d’un colloque sur la question, qui s’est tenu en décembre 2011 à Tahiti. (...)
« Environ 4 millions de personnes vivent aujourd’hui dans une île corallienne de moins de 1 km2 et d’au mieux 3 mètres d’altitude », ajoute Alexandre Magnan, chercheur à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), et coauteur de Ces îles qui pourraient disparaître [1].
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La montée des eaux n’est pas le seul problème concrètement posé par le dérèglement climatique. Les océans absorbent une grande part des émissions de CO2, ce qui bouleverse la chimie de l’eau et affecte les organismes qui y vivent, à commencer par les très sensibles coraux (...)
La ciguatera est une intoxication alimentaire courante dans les zones tropicales, due à la consommation de poissons de lagon infectés par des micro-algues qui produisent de puissants neurotoxiques et se développent notamment dans les coraux morts. « C’est une conséquence directe de l’acidification des océans, mais même dans cet atoll où la population importe désormais des boîtes de conserve, si tu vas leur parler de changement climatique et de l’alerte des scientifiques, ils te diront que non, ils ne connaissent pas, ils ne le voient pas, insiste Matahi Tutavae. Le but de nos actions est de réconcilier ces deux mondes : les scientifiques, bien souvent occidentaux, et les populations locales, que les deux se comprennent. » (...)