
Véritable thriller social, ce film nous plonge au cœur de la lutte des sidérurgistes, et du directeur, pour sauver leur aciérie, Ascoval, à Saint-Saulve, près de Valenciennes. Usine de recyclage, qui fabrique de l’acier à partir de ferrailles, Ascoval est une des aciéries les plus modernes d’Europe, respectueuse des normes environnementales, admirablement située (autoroutes, réseau ferroviaire, Escaut) qui emploie 281 salariés. Un jour, patron et employés apprennent que Vallourec, qui a créé l’usine et en reste le principal actionnaire et client, a décidé de la fermer, accordant sa préférence à son implantation dans d’autres pays. Ils tombent des nues. Après un rendez-vous à Bercy (l’Etat est l’actionnaire principal de Vallourec), Ascoval obtient un délai d’un an pour trouver un repreneur. Commence alors un véritable parcours du combattant, plein de rebondissements, surprises, moments de découragement, voire désespoir, avec trahison (double jeu de Bercy), valse des repreneurs, acharnement haineux de Vallourec…
Le réalisateur, qui a accompagné cette lutte au plus près pendant plus d’un an, nous en livre un récit palpitant, dans un document exceptionnel, vibrant d’humanité.
A partir du délai accordé par Bercy, il rythme son documentaire par des sous-titres sur fond de flammes : « 1er jour »…« 15e jour »…« 142e jour »…« 288e jour »…« 463e jour », donnant à son film une allure de suspens qui tient en haleine le spectateur. Et nous sommes transportés au plus profond de cette aciérie et de cette bataille pour la survie, que nous suivons pas à pas. (...)
L’immersion d’Eric Guéret dans Ascoval lui a permis de créer une relation privilégiée avec les différents acteurs de ce combat, dont, au premier plan les délégués syndicaux, et il a recueilli des témoignages, des confidences d’une grande qualité et sincérité. Beaux et rares moments de profondeur, de vérité humaine, que capte le réalisateur, avec, souvent de superbes gros plans des visages. Les uns et les autres racontent leur parcours, expriment leurs doutes, inquiétudes, colère, laissent échapper quelques larmes parfois, ou restent dans un silence éloquent. (...)
En ces temps étranges, d’interrogations sur la mondialisation, sur « le monde d’après », ce documentaire trouve une résonnance toute particulière. Il est une pierre à apporter aux réflexions et combats qui se livrent ici et là pour inventer un autre possible.