
Alors que le nouveau Premier ministre grec vient de former un « gouvernement d’union nationale », la vie quotidienne des grecs continue d’être marquée par des augmentations des taxes sur les biens de première nécessité, la baisse des salaires et la hausse du chômage. Dans un contexte où le nombre de suicides augmente, où l’exode des jeunes grecs s’intensifie, l’économiste Marica Frangakis, membre d’Attac Grèce, analyse pour Basta ! la situation politique interne et appelle à la solidarité des peuples d’Europe.
(...) L’austérité en Grèce a un visage. Ce sont des rangées de boutiques fermées et qui affichent « à vendre » ou « à louer ». Des signes que l’on retrouve aussi sur les façades des appartements, alors que le marché immobilier est en chute libre. Ce sont les boutiques d’achat et de vente d’or qui, subitement, prolifèrent. Ce sont des lignes de taxis jaunes attendant les clients. Ce sont les conversations étouffés dans les autobus, les gens se racontant leurs problèmes. Beaucoup sont gênés de dire qu’ils n’ont pas assez d’argent pour leurs besoins quotidiens. Ce sont des enfants qui s’évanouissent à l’école et admettent n’avoir pas eu de repas solide depuis plusieurs jours. Ce sont les manifestations et les marches à travers le centre d’Athènes. Ce sont des grèves qui rendent la vie quotidienne difficile, mais auxquelles les gens font face sans se plaindre. C’est le nombre croissant de suicides de pères au chômage qui ne peuvent pas nourrir leurs familles, d’hommes d’affaires qui ne peuvent pas payer leurs dettes. Athènes est devenu un endroit déprimant pour vivre en ce moment. La situation n’est pas si mauvaise dans d’autres endroits, notamment dans les villes plus petites où les réseaux sociaux sont plus resserrés. Cependant, à mesure que la crise s’aggrave, la Grèce entière est entrainée dans une spirale infernale. (...)
Il est à noter que tous les partis de l’aile gauche ont refusé de participer à ce nouveau gouvernement. En ce sens, ce n’est pas vraiment un gouvernement d’ « union nationale », car il ne se compose que de membres des deux grands partis et du LAOS. Le fait que la grande majorité des ministres soient les mêmes que dans le précédent gouvernement PASOK est une indication supplémentaire que ce n’est que la continuation du passé. Enfin, il est clair pour tout le monde que le nouveau Premier ministre, Lucas Papadémos, a été choisi en raison de ses liens avec les marchés financiers et les forces conservatrices de l’Union européenne, en tant qu’ancien vice-président de la Banque centrale européenne (BCE) et président de la Banque centrale de la Grèce.
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La crédibilité des deux grands partis est très faible. Les « indignés » grecs sont des gens ordinaires de tous âges et ils expriment leur frustration à chaque occasion, de manière pas toujours pacifique – en lançant par exemple yaourts et œufs sur des ministres du gouvernement ! Cette tension a augmenté depuis fin 2009, alors que la crise de la dette publique s’étalait et que les banques grecques ont été généreusement soutenues par l’État du fait de la crise financière mondiale. Comme les mesures d’austérité introduites depuis 2009 sont très dures et socialement injustes, la tension sociale grandit.
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La crise a été un catalyseur de mobilisations. Elle a fait sortir les gens dans les rues. Ces protestations sont croissantes et prennent des formes diverses au fil du temps. C’est une expression de mécontentement social qui évolue et qui n’est pas conforme aux idées préconçues traditionnelles.