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blogs de Médiapart/ maxime.tallant, étudiant en journalisme
L’électricité, un bien commun dans les mains du marché
#electricite
Article mis en ligne le 5 décembre 2022

Le 29 août dernier, le sénateur communiste Fabien Gay laisse exploser sa colère sur la libéralisation du marché de l’électricité : « Ce sont des requins et dès qu’ils peuvent se goinfrer, ils le font sur notre dos ! ». Cette scène témoigne d’une colère partagée par bon nombre de citoyens. Comment un bien commun se retrouve aux mains du marché ?

Une crise inévitable ?

Nous sommes le 1er octobre 2021, soit environ quatre mois avant que la folie de Vladimir Poutine ne s’abatte sur l’Ukraine. Pour les consommateurs, le tarif réglementé du gaz s’envole depuis des mois. Ce 1er octobre il vient même d’atteindre 12,6% d’augmentation. Pourtant, la Russie n’a pas encore coupé ses livraisons et entamé sa guerre énergétique, ce qui justifierait l’augmentation.

Pourtant la crise est là et comprime déjà le pouvoir d’achat des ménages. Le spectre des gilets jaunes plane de nouveau sur la France. Si les gouvernements espagnols ou italiens prennent des mesures, en France l’exécutif tempère. Le 30 septembre, Jean Castex, invité du 20h de TF1 se veut rassurant : « nous avons à gérer une bosse ». Pour le premier ministre, la reprise de la demande post-covid, unique responsable, devrait s’atténuer dans les mois à venir. Tout devrait rentrer dans l’ordre. (...)

En 2010, l’économiste Raphaël Boroumand soutient une thèse intitulée : « Fonction d’intermédiation et dynamique concurrentielle : le cas de la fourniture sur les marchés électriques ». Dans son résumé, disponible en source libre, on peut notamment lire : « les spécificités de la concurrence de détail électrique les incitent à adopter des comportements-prix parallèles pour maximiser leur profit ». En somme, l’électricité n’est pas un bien adapté à la concurrence. Puisqu’on ne peut la stocker, le réseau doit se maintenir en permanence à 50 Hertz. Dès lors, la demande doit parfaitement se superposer à l’offre. Devant cette évidence, les contraintes physiques l’emportent. Une évidence pourtant balayée par Bruxelles qui préfère s’en remettre, comme toujours, au marché.

Libéralisation aveugle

Fin 2021, toutes les conditions se sont alignées pour mettre en lumière l’absurdité du marché européen. Un hiver froid, une reprise de la demande désordonnée et un manque de vent en Europe du Nord. Le cocktail fait voler en éclat le marché. Les prix du gaz TTF s’envolent entraînant inévitablement ceux de l’électricité. Toute l’absurdité se trouve ici, dans ce lien entre les prix du gaz et de l’électricité. Le marché a été construit sur des fondations irrationnelles.

En Europe, le gaz est devenu une énergie incontournable. Cette mutation a notamment changé les relations géopolitiques. (...)