
25 suicides à France Télécom. Bientôt La Poste ? Le politologue Gildas Renou vient de passer les dix dernières années à travailler avec les salariés de France Télécom et de La Poste. Les deux anciennes entreprises publiques sont devenues, selon lui, des laboratoires de « l’antipathie » au travail...
« Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les conditions d’autres drames se préparent ailleurs. Nous pensons à La Poste notamment. » Dans la foulée des 25 suicides à France Télécom et de leur médiatisation, le politologue français Gildas Renou a publié un article intitulé « les laboratoires de l’antipathie » (Revue du Mauss, 29 septembre 2009).
...« Le travail salarié traverse certainement aujourd’hui l’une des crises les plus graves de son histoire. (...) La financiarisation de l’économie articulée aux innovations des sciences du management a modifié radicalement la donne. Le travail est en train de perdre son sens aux yeux des salariés, l’apport de chacun n’y étant plus reconnu, la joie tendant à y disparaître. »...
...« La stratégie était d’opposer les ouvriers des équipes de jour et de nuit, d’opposer les travailleurs. La désorganisation des centres de tri a été sciemment préparée pour semer la zizanie au sein des équipes. Les chefs d’équipe, les petits chefs, n’arrivent plus à régler la situation. Le travail devient très douloureux et cela est hélas, volontaire, pour atteindre les objectifs d’allègement de 30 % de la masse salariale, soit 33 000 facteurs et plusieurs milliers de trieurs. »...
...Leurs règles sont simples : diviser les travailleurs, identifier les potentiels meneurs, élaborer des discours culpabilisants, demander aux agents de postuler pour obtenir le poste qu’ils occupent déjà, pousser à la démission, effacer le lien social qui peut avoir entre les salariés, et leur appliquer cette kyrielle de mesures toutes plus scolaires : autoévaluation, entretiens répétés, grilles de notations... « Tout cela, pour bien faire comprendre aux salariés que leur savoir-faire n’en est pas un et qu’ils sont interchangeables. »...
...« Plus globalement, c’est le capitalisme qu’il faut questionner. La France ne peut pas faire l’économie de ce débat-là. »