
Le message médiatique rassurant qui a émergé des 690 pages du World Energy Outlook 2012, publié la semaine dernière, s’avère un trompe-l’œil. Ce message, dépiauté dans mon post précédent, était un signal d’abondance : les Etats-Unis s’apprêtent à redevenir rois du pétrole grâce au boom des huiles de schiste ; ipso facto, il n’y pas de limites en vue aux ressources d’extraction d’or noir.
Premier indice de ce trompe-l’œil : tout en claironnant l’annonce d’un retour de l’Amérique du Nord à l’autosuffisance pétrolière au cours de la prochaine décennie, l’AIE prévoit subrepticement (page 101) un déclin de la production hors-Opep "peu après 2025", avec un plateau maximal atteint "après 2015".
Déconcertant, si l’on se souvient que les Etats-Unis et le Canada sont, après la Russie, les principaux pays producteurs hors-Opep. (...)
l’AIE prévoit une stagnation quasi imminente puis un déclin "peu après 2025" de la production hors-Opep, laquelle constitue 57 % de la production totale actuelle ; pour l’Opep, l’accroissement serait limité à moins de 5 Mb/j d’ici à 2025, essentiellement grâce à l’Irak - un pays... compliqué.
L’ensemble du pronostic est tributaire d’une capacité incertaine à compenser le déclin des extractions de très nombreux champs parvenus à "maturité" (les plus anciens, les plus vastes, les plus aisés à exploiter), en ayant recours à des champs "restant à découvrir" ainsi qu’à des pétroles non-conventionnels aux propriétés médiocres, plus lourds ou au contraire plus légers que ce qu’il est convenu d’appeler du "pétrole".
L’Agence internationale de l’énergie, institution émanant de l’OCDE installée le long de la Seine à Paris, financée principalement par les Etats-Unis et manifestement placée sous l’influence étroite de Washington durant les années Bush, reconnaît désormais le fondement du problème du pic pétrolier en des termes identiques à ceux employés depuis plus de dix ans dans de nombreuses analyses dites "pessimistes". (...)