
Cet homme a tout connu, la Résistance en France, le camp de Buchenwald, l’engagement et la rupture avec le communisme, un parcours reconnu dans la littérature et le cinéma, et même une participation active aux années de construction de la démocratie dans son pays, l’Espagne, en tant que ministre de la Culture du gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez dans les années 80.
Sa mémoire était celle du siècle, celle de l’Espagne d’abord, où s’est joué le premier round de la Seconde Guerre mondiale. Vivant à Paris, il était très attentif aux débats politiques dans son pays natal, et se félicitait du réveil d’une mémoire volontairement enfouie à la mort de Franco, prix à payer pour une transition démocratique très particulière :
« Il y a eu amnistie et amnésie. L’amnistie, c’est évident, ça passe par la loi, mais l’amnésie, ça ne se légifère pas. On ne peut pas dire, comme dans l’Edit de Nantes : “Il est interdit de rappeler les troubles du passé”… Ça a trop duré en Espagne, et c’est un signe de bonne santé démocratique qu’on puisse aujourd’hui se permettre le luxe de retrouver la mémoire. »(...)
Jorge Semprun avait justement présenté au festival un documentaire qu’il avait conseillé et dans lequel il figurait, intitulé « Les Chemins de la mémoire », de José-Luis Péñafuerte(...)
Jorge Semprun a beaucoup fait, dans sa vie, pour alimenter le fleuve de la mémoire. Dans ses livres, mais aussi, on l’a parfois oublié, dans des scénarios qui ont marqué. Il a ainsi travaillé avec le réalisateur grec Costa-Gavras, un autre exilé d’une dictature européenne réfugié à Paris, pour produire trois films majeurs : « Z », « L’Aveu », et « Section spéciale » : (...) Wikio