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« Il ne faut pas négocier avec le chantage, il faut rompre avec lui »
Article mis en ligne le 20 juin 2015

Compte-rendu de la deuxième journée de présentation du rapport préliminaire de la Commission pour la Vérité sur la dette publique grecque (...) deuxième et dernière journée de présentation du rapport préliminaire de la Commission pour la Vérité sur la Dette publique grecque. La journée s’est conclue par une conférence de presse qui actait la remise officielle de ce rapport qui affirme le caractère illégitime, illégal, odieux et insoutenable de la dette publique grecque.

(...) Ainsi le coordinateur scientifique de la Commission d’audit, Éric Toussaint, a dévoilé de nouveaux éléments concernant le contexte dans lequel le premier « plan d’aide » a été octroyé à la Grèce. L’affaire est pourtant déjà connue et se trouve d’ailleurs actuellement entre les mains de la justice grecque : en 2009, le gouvernement Papandréou a falsifié les données statistiques du pays. En gonflant le déficit, les autorités grecques souhaitaient convaincre l’opinion publique de la nécessité d’accepter le « sauvetage » de 2010. Mais cette affaire aux multiples rebondissements ne cesse de dévoiler de nouveaux scandales. Ainsi le ministère de la défense grec a révélé aux membres de la Commission d’audit, il y a deux jours, que dans le cadre de cette falsification un montant de 3 milliards d’euros relatifs à des dépenses militaires n’aurait pas dû figurer dans les comptes de 2009. Un trucage qui vient donc s’ajouter à la longue liste déjà connue |3| . Et les découvertes ne s’arrêtent pas là puisque le ministère de la justice affirme également qu’au cours de la période 2009-2014 des achats d’armes ont été effectués sans factures, permettant ainsi aux entreprises qui ont réalisé la vente d’échapper à tout impôt !

Mais la justification donnée au plan d’aide de 2010 ne s’avère pas être le seul mensonge offert aux peuples européens, son contenu fut également un écran de fumée. Ainsi on a pu apprendre par la voix de Leonidas Vatikiotis que, tandis que les dirigeants européens ne cessent de rappeler - en particulier ces derniers jours - qu’ils ont fait preuve d’une grande solidarité envers le peuple grec, seuls 10 % des montants octroyés au pays dans le cadre des mémorandums ont, en réalité, été consacrés aux dépenses courantes du gouvernement. « Les sommes soi-disant versées pour la Grèce ont fait le tour de l’Acropole et sont reparties directement dans les poches des créanciers et dans les caisses des banques privées » a-t-il expliqué.

Quant aux « mesures de redressement » qui ont accompagné les prêts accordés à la Grèce et dont l’objectif officiel est de retrouver l’équilibre des finances du pays, elles sont également épinglées par la Commission d’audit. Les experts de la Commission nous apprennent ainsi que dans le cadre des privatisations imposées par les Institutions quelque 28 bâtiments publics ont été vendus pour une bouchée de pain.(...)

Au-delà de la remise en question de l’efficacité économique des mesures d’ajustement appliquées depuis 5 ans en Grèce, l’équipe de scientifiques a également dressé le bilan humain de ces dernières. Et les chiffres énoncés par l’historien Spyros Marketos ont de quoi donner le tournis. « Depuis l’application des mémorandums les retraites ont chuté d’environ 40 %, laissant près de 2/3 des pensionnés sous le seuil de pauvreté. 40 % des postes de fonctionnaires ont été supprimés. 500 000 personnes sont sans domicile fixe ou vivent dans un logement indécent. Quant au chômage il est passé de 7,3 % à 27,9 % entre 2008 et 2013 » déclarait-il à la tribune du Parlement. (...)

« Ces politiques ont conduit des millions de Grecs dans la pauvreté extrême. Cette situation lamentable est due aux actes et aux omissions des institutions impliquées dans les mémorandums qui n’ont pas respecté leurs obligations en matière de droits humains ». Pour ces spécialistes du droit, il est indéniable que les institutions responsables de ces politiques ont violé un nombre impressionnant de traités et de conventions internationaux dont ils sont pourtant signataires. Monsieur Lumina a d’ailleurs tenu à mettre les points sur les « i » : « On entend très souvent que le FMI n’a pas l’obligation de respecter ces textes. Il s’agit d’une fiction ».

Face à l’impressionnante liste de violations de droits et au vu des nombreuses irrégularités présentées au cours de ces deux journées, le coordinateur scientifique a présenté devant la presse les conclusions qu’en tire la Commission. « Nous considérons que le remboursement de la dette a des effets tels que l’État grec est parfaitement en droit de suspendre de manière souveraine le paiement de sa dette » a-t-il ainsi déclaré. (...)

Si l’issue des négociations entre le gouvernement et ses créanciers reste le grand point d’interrogation, cette deuxième journée de présentation fut une fois de plus l’occasion de constater que nombreux sont les citoyens européens qui soutiennent la résistance du peuple grec à ses créanciers et souhaitent que la vérité soit faite sur la dette.

Les appuis sont effectivement nombreux, en témoigne la liste des représentants étrangers qui ont fait le déplacement pour l’occasion (...)

Cette solidarité se concrétisera également tout au long de la semaine à venir dans le cadre de la semaine d’action en solidarité avec la Grèce organisée par de très nombreux mouvements sociaux partout en Europe |7|.

La semaine à venir s’annonce définitivement décisive et nous permettra une fois de plus de mettre à l’épreuve des faits, ce propos de Thucydide lorsqu’il évoquait la constitution de son peuple : « Elle a reçu le nom de démocratie, parce que son but est l’utilité du plus grand nombre et non celle d’une minorité ».