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Entre les lignes entre les mots
Il ne faut pas laisser les intellectuels jouer avec les allumettes
Article mis en ligne le 5 mai 2016
dernière modification le 2 mai 2016

(...) Dans son avant-propos, qui résonne particulièrement pour moi, Shlomo Sand parle, entre autres, de son malaise « face à une partie des matériaux inclus dans le concept d’« intellectuel ». », de sa passion de la lecture, « voguer joyeusement vers des contrées magiques », de livres qui excitaient sa curiosité et « nourrissaient mon imagination quelque peu poétique », des errances de Jean Paul Sartre et de Simone de Beauvoir (et du souvenir de Bianca Lamblin), des intellectuels « parisiens », d’Albert Camus…

L’auteur analyse certains mythes à défier, comme le film de Claude Lanzmann Shoah et l’oubli des persécution des populations juives à l’ouest du Rhin. Il indique « L’accumulations de petites vérités est susceptible de corroder et de remettre en cause de grandes mythologies » et rend hommage à Simone Weil, André Breton, Daniel Guérin ou George Orwell, « ils ont tenu bon face aux trois plus grands crimes du siècle : le colonialisme occidental, le stalinisme soviétique et le nazisme allemand, sans dédouaner aucun d’eux à l’aide d’une quelconque justification philosophique à base libérale, nationale ou de classe ». (...)

Shlomo Sand analyse les caractéristiques des « producteurs de biens symboliques », la notion et l’histoire de l’« intelligentsia », la place « des événements consécutifs au procès militaire d’Alfred Dreyfus », les définitions variables historiquement des « intellectuels », l’« intellectuel » producteur de « haute culture », les « érudits », le capital symbolique comme rapport social, la démocratisation de l’enseignement supérieur et ses effets, l’univers des symboles, les marges d’autonomie des intellectuels par rapports aux pouvoirs institutionnels ou économiques…

L’auteur rappelle la défense « des pratiques criminelles, appliquées en URSS » par maint-e-s intellectuel-le-s prestigieuses/eux, les éminents érudits ayant soutenu le régime nazi Allemagne, ou les béquilles du « maoisme et de ses gardes rouges, précisément durant les années les plus totalitaires de la Chine », etc. Je pourrai allonger la liste des forfaitures…

Shlomo Sand parle aussi des intellectuels publics, « La plupart des intellectuels n’ont rien contre l’image que leur renvoie le miroir, et l’autocritique se fait rare dans leurs propres écrits », de la dérive conservatrice, de l’assimilation « anti-intellectualisme » et « anti-totalitarisme » et interroge : « quelle est la motivation principale de la production intellectuelle » ?

Transformation des rapports sociaux, du climat idéologique, « Autrement dit : la place et le statut de l’intellectuel dans l’arène publique sont-ils les mêmes qu’à la fin du XIXe siècle, tandis que seules ses valeurs auraient changé ? Les « moyens de production » classiques de l’intellectuel sont-ils encore la source de ses modes de manifestation dans notre univers spirituel ? ».

Sans négliger pour autant les paroles peu audibles dans les médias et la place publique, le bouillonnement réflexif sur de multiples blogs, sites et parfois ouvrages, je partage cette appréciation de l’auteur en fin d’introduction : « alors que l’intellectuel parisien moderne est né dans le combat contre la judéophobie, le crépuscule de l’intellectuel du début du XXIe siècle s’inscrit sous le signe d’une montée de l’islamophobie » (...)