Ce n’est pas une surprise. Depuis plus de deux siècles, la contestation politique fait partie du codé génétique de la société française. La manifestation de rue et la grève sont, en France, non seulement des droits constitutionnels mais des modalités naturelles d’exercer la pleine citoyenneté. Chaque nouvelle génération considère que participer aux houles cycliques de colère sociale constitue un indispensable rite de passage pour accéder à la maturité démocratique.
La colère actuelle est l’expression d’une intense souffrance enfouie et d’une accumulation de chagrins refoulés : crises successives, dureté de la vie ordinaire, peurs du lendemain, chômage, précarité, pauvreté (il y a 8 millions de pauvres)... Ce n’est plus une affaire de retraites mais une bataille pour un autre modèle social. On ne peut donc pas s’étonner que le soutien des Français à ce mouvement de colère sociale, selon les enquêtes, se soit constamment situé entre 60% et 70%...
Nul ne comprend pourquoi la France ruinée de 1945 a pu mettre sur pied un Etat providence, tandis que la France d’aujourd’hui, cinquième puissance économique mondiale, ne serait plus en mesure de le financer. Jamais pourtant le pays n’a disposé d’autant de richesses. (...)