
Le golfe de Fos, entre le delta du Rhône et l’étang de Berre, concentre de nombreuses industries lourdes. Des études menées par la société civile ont mis en évidence le lien entre la pollution environnementale et la santé des riverains. Devant l’absence de réaction de la part de l’État, les habitants ont décidé de saisir la justice.
"C’est bien dommage d’aller en justice, mais il n’y a plus d’autres moyens pour essayer de faire entendre raison. Nous ne sommes plus à l’époque des mines, nous n’acceptons plus d’être de la chair à canon », dit avec tristesse René Raimondi, maire (PS) de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), à une assemblée de près de 400 personnes réunies au théâtre de la ville. La réunion publique est organisée, ce lundi 12 février, par l’Association de défense et de protection du littoral du golfe de Fos (ADPLGF). Elle a pour objet d’informer sur les procédures judiciaires qui vont s’engager pour inciter, enfin, les autorités à réagir sérieusement aux dangers sanitaires que subit la population locale au voisinage de l’un des plus grands complexes portuaires et industriels d’Europe.
La zone industrialo-portuaire (ZIP) concentre 40.000 emplois, la majorité des habitants de Fos-sur-Mer y travaillent. « On tremble tous quand une industrie menace de s’arrêter, mais au fond de nous, on est très inquiets pour notre santé », poursuit le maire. « Nous ne demandons aucune fermeture de site. Nous voulons simplement que l’inégalité environnementale et sanitaire soit prise en compte et que les services de l’État agissent pour faire limiter les pollutions », précise Daniel Moutet, le président de l’ADPLGF. (...)
En 2010, l’incinérateur des déchets de l’aire urbaine de Marseille s’est ajouté au paysage. Les baigneurs sont désormais encadrés par les cargos en attente d’accostage et les cheminées d’usine. PCB, métaux lourds, dioxine, particules fines… les 100.000 habitants de la zone sont exposés à des pollutions dangereuses. (...)
"La science est un enjeu de pouvoir. Les 37 études menées par les pouvoirs publics et les industriels ont affirmé qu’il n’y avait pas problème sanitaire. Jusqu’à Fos-Epseal, les citoyens ne bénéficiaient d’aucune étude qui partait de leurs questionnements », dit Yolaine Ferrier. L’étude propose une approche croisée entre épidémiologie, biostatistique, sociologie et anthropologie. Elle est sortie en janvier 2017 et ses résultats révèlent des éléments préoccupants : deux fois plus de cancers par rapport à la moyenne nationale (11,8 % pour le golfe de Fos contre 6 % en France), l’asthme (15 % contre 10 %) et le diabète (12,9 % contre 5,2 %) sont également plus importants ici qu’ailleurs. (...)
Les preuves s’accumulent et les services de l’État ne bougent toujours pas. Timidement, l’Agence Régionale de Santé a concéder au journal indépendant Marsactu, lors de la publication de l’étude Scénarii, que l’endroit est « une zone inégalitaire pour la santé » par rapport au reste du territoire, « liée à l’environnement particulièrement impacté par l’industrie et le trafic routier et maritime ». (...)