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Usbek et Rica
Faut-il sauver l’humanité de la « tyrannie des mathématiques » ?
Article mis en ligne le 21 novembre 2017
dernière modification le 20 novembre 2017

On ne sait pas s’il a raison lorsqu’il prédit la fin de l’humanité d’ici deux ou trois générations, mais puisque personne ne le prenait au sérieux quand il annonçait avant tout le monde la crise des subprimes de 2007, ça vaut le coup de l’écouter aujourd’hui. Paul Jorion a publié le 2 novembre un nouvel ouvrage : À quoi bon penser à l’heure du grand collapse ? (Fayard). Un livre en forme de long entretien, dans lequel il raconte comment, de la langue grecque aux mathématiques, nous avons fait fausse route en transformant le monde en équations. Il parle aussi de « revenu de subsistance », de « guerre civile numérique » et de « société termite ».

Anthropologue et sociologue de formation, Paul Jorion est indifféremment présenté comme économiste, essayiste, spécialiste de la cognition et de l’intelligence artificielle, ou même collapsologue. L’intellectuel belge doit son aura auprès du grand public pour avoir prédit et décrit de l’intérieur la crise financière de 2008. « Il y a quelque chose chez lui du savant de la Renaissance », capable de mêler les disciplines et d’embrasser les sciences mathématiques aussi bien que la philosophie, écrivent Franck Cormerais, professeur en sciences de l’information et de la communication à l’université de Bordeaux-Montaigne et Jacques Athanase Gilbert, professeur de littérature comparée à l’université de Nantes. (...)

Pour l’anthropologue, tout part du langage. Il explique que la vision du monde de l’Occident, notre perception même de la réalité, ainsi que l’émergence de la science moderne et de ses découvertes, tout cela est le produit d’une façon de penser bien particulière, forgée par la langue grecque. Selon Paul Jorion, la structure du grec, notamment les relations d’inclusion que cette langue permet entre les mots, rend possible la logique, la pensée scientifique par déduction rationnelle, et donc l’élaboration de modèles théoriques.

Par comparaison, la structure du Chinois n’a autorisé que le développement de la science par expérimentation qui, si elle a permis d’inventer le papier, la boussole ou le gouvernail d’étambot, « aurait interdit d’envisager l’invention de la bombe atomique », écrit Paul Jorion, tout en soulignant qu’il n’existe aucun mot chinois équivalent à « théorie » ou « réalité ».

Les scientifiques platoniciens sont persuadés « qu’une équation permettait de plonger dans l’essence même des choses »

De notre logique découle notre vision de la réalité, perçue à tort comme objective et universelle. (...)