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Escroqués par des universités privées à but lucratif, des étudiants exigent l’annulation de leur dette et...
Article mis en ligne le 27 février 2015
dernière modification le 23 février 2015

La dette des étudiants américains : une violence insupportable faite à une génération

Aux États-Unis, la crise des subprime qui a débuté en été 2006 a révélé au grand jour les malversations des banques et de la finance qui ont escroqué des millions de familles, en particulier les plus pauvres, avec des prêts immobiliers que celles-ci n’allaient pas pouvoir rembourser. Mais ces prêts hypothécaires ne représentent qu’un dispositif parmi une vaste gamme de crédits prédateurs dans laquelle on retrouve les prêts pour dépenses de santé, les prêts personnels, les crédits attachés aux cartes bancaires, les prêts aux collectivités, mais également les prêts aux étudiants.

Faire des études aux États-Unis coûte cher car la scolarité est payante. Résultat : deux-tiers des étudiants sortent de l’université avec une dette en moyenne de 27 000 dollars. En 2012, on estimait que la dette totale des étudiants dépassait les 1 000 milliards de dollars, une dette supérieure à celle des cartes de crédit ou à toutes les autres sortes de prêts aux particuliers à l’exception des prêts immobiliers |1|.

À la fin de leurs études, beaucoup d’étudiants sans emploi se trouvent pris au piège d’une dette qui les étrangle. Isolés, ils sont à la merci des banques et de leurs créanciers. Mais depuis quelques années, un collectif citoyen, combatif et imaginatif, a entrepris de les fédérer et de les appuyer dans leur combat contre les banques mais également contre les universités qui ont empoché de conséquents frais d’inscription sans leur assurer les débouchés annoncés. Ce collectif, c’est Strike Debt |2|.

Strike Debt est un mouvement de réfractaires à la dette qui se bat pour la justice économique et les libertés démocratiques. Il appuie son action sur un certain nombre de principes : la lutte contre l’oppression, l’indépendance, la prise de décision démocratique et l’action directe. Des groupes de ce mouvement se battent partout dans le pays aux côtés des populations victimes du système de la dette en mettant à leur disposition des stratégies de lutte, des outils et un cadre pour structurer leur action.
Ann Larson, une militante très active de Strike Debt, nous relate le combat mené fin 2014 par des étudiants endettés contre une université privé américaine et contre le ministère de l’éducation nationale. (...)

Beaucoup de gens ne comprennent pas la différence entre institutions à but lucratif, publiques, et privé sans but lucratif. Les trois génèrent des revenus, mais seule celle à but lucratif a pour vocation première d’enrichir ses propriétaires. Les plus importantes de ces institutions sont des sociétés nationales conçues pour maximiser les profits de leurs actionnaires plutôt que d’assurer l’éducation des étudiants.

Aujourd’hui, environ 10 % des étudiants des universités américaines sont inscrits dans ces établissements d’enseignement qui encaissent pourtant plus du quart de toute l’aide financière fédérale, jusqu’à 33 milliards de dollars pour une seule année. Les universités privées à but lucratif peuvent être jusqu’à deux fois plus chères que les universités les plus cotées du pays et coûter généralement cinq à six fois le prix des centres universitaires.

Quatre-vingt-seize pour cent des étudiants qui parviennent à obtenir un diplôme dans un établissement privé à but lucratif le quittent en devant de l’argent, et ils sont deux fois plus endettés que les étudiants des établissements traditionnels. (...)

Tout comme le mouvement ouvrier s’est développé durant des décennies pour protéger les droits et les conditions de vie des travailleurs, le mouvement des débiteurs pourrait lui aussi aider à contrecarrer les pratiques les plus prédatrices de la classe des créanciers. Un vieil adage dit : « Si vous devez à la banque 100 000 dollars, vous êtes à la merci de la banque, mais si vous devez à la banque 100 millions de dollars, c’est la banque qui est à votre merci. » Démultiplier cette puissance collective est l’idée qui anime le Collectif de la Dette.