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"Esclavage moderne" : quand des travailleurs sans-papiers se mettent en grève contre Chronopost
Article mis en ligne le 16 août 2019

Heures supplémentaires, heures de nuit non-payées, pressions, menaces… Une quarantaine de travailleurs sans-papiers de Chronopost d’Alfortville, en région parisienne, ont installé depuis deux mois un piquet de grève devant l’agence affiliée à la Poste afin de dénoncer leurs conditions de travail. Ils réclament aussi leur régularisation. Chronopost renvoie la responsabilité du dossier à son sous-traitant.

À première vue, on pourrait penser qu’on se trouve dans un camp de migrants, comme il en existe des dizaines dans le nord de Paris. Mais les trottoirs du chemin de Villeneuve-Saint-Georges, à Alfortville, abritent en réalité depuis deux mois un piquet de grève de travailleurs sans-papiers.

"Salaire de misère et conditions de travail dignes de l’âge de pierre"

La majorité des grévistes est originaire d’Afrique subsaharienne, plus particulièrement du Sénégal et du Mali. Ils travaillent pour Chronopost depuis des mois, voire des années "pour un salaire de misère" et des "conditions de travail dignes de l’âge de pierre", signale Jean-Louis Berlatier du syndicat Solidaires Val-de-Marne, qui soutient, comme d’autres corporations, le mouvement des sans-papiers. (...)

"Au départ, il n’y avait que nous mais nous avons été rejoints par des travailleurs sans-papiers de toute l’Ile-de-France", explique Amadou Fofana, porte-parole des grévistes de Chronopost, présent en France depuis plusieurs mois après avoir traversé la Méditerranée via le Maroc l’année dernière. (...)

Les contestataires réclament depuis le 11 juin leur régularisation et de meilleures conditions de travail. Tous sont employés pour le déchargement des colis et le tri et effectuent "les travaux que les autres salariés refusent de faire", peste Amadou qui travaille depuis cet hiver pour la filiale de La Poste. Il faut dire que les conditions de travail sont à la limite de la légalité. (...)

"seules des personnes sans-papiers sont embauchées pour cette tâche".

Pressions et menaces

Les employés disent subir continuellement la "pression" et les "menaces" de leur direction. "On est surveillés en permanence. Quand je vais deux minutes aux toilettes, mon responsable toque à la porte en me demandant de me dépêcher", assure Mohamed qui travaille pour Chronopost depuis un an et demi.

"On a 30 minutes maximum pour décharger seul un camion rempli de colis. Le chef vient régulièrement nous voir en nous disant d’aller plus vite sinon il nous ‘vire’", grince Demba, un autre travailleur sans-papiers. (...)

Les salariés sans-papiers redoutent par-dessus tout de tomber malade ou d’avoir un accident du travail. Ils ont pourtant un contrat, censé les protéger, mais ce contrat n’est pas à leur nom. Pour signer des contrats de travail, les sans-papiers utilisent des "alias", les noms de proches en situation régulière.

(...)

"Si on se plaint, ils nous disent : ‘Si vous ne voulez plus travailler pour nous ce n’est pas un problème, il y a plein d’autres sans-papiers qui le feront’", indique Amadou. (...)

Chronopost renvoie la responsabilité à son sous-traitant

Épuisés, les grévistes veulent obtenir leur régularisation. Pour ce faire, ils doivent obtenir des justificatifs de travail à leur nom. C’est là que les choses se compliquent. Chronopost refuse de prendre la responsabilité du dossier. Pour se défendre, l’entreprise, filiale de la Poste, se défausse sur son sous-traitant, l’entreprise Derichebourg qui elle-même sous-traite le recrutement de ses salariés à une agence d’intérim.