
Le professeur des universités Gabriel Galvez-Behar dénonce, dans une tribune au « Monde », la dégradation des conditions de vie des étudiants et réclame au ministère de l’enseignement supérieur des moyens pour y faire face.
Tribune. L’accueil des étudiants en présentiel, décidé par le président de la République le 21 janvier, permettra peut-être de limiter les effets nocifs d’un enseignement à distance imposé. La mise en place de cette mesure est cependant difficile du fait des contraintes – une limite à 20 % des capacités d’accueil, les problèmes de restauration des étudiants –, du retard mis à fixer le cadre réglementaire – le décret autorisant ce retour a été publié plus d’une semaine après l’annonce – et enfin de la versatilité des décisions – celle du chef de l’Etat annulant celles que le premier ministre avait prises une semaine plus tôt. (...)
Ces incohérences ne contribuent pas à entretenir la mobilisation de la communauté universitaire ; elles nourrissent plutôt son sentiment de découragement. En effet, cet épisode est le dernier d’une longue série d’atermoiements qui caractérisent la gestion de la crise par le ministère de l’enseignement supérieur. Curieusement, au début de l’année universitaire, ce dernier a fait preuve d’une détermination autrement plus forte pour mener à son terme une loi de programmation de la recherche critiquée par la quasi-unanimité de la communauté, ou pour laisser entamer les prérogatives du Conseil national des universités. Il a ainsi choisi ses priorités, laissant les établissements et leurs personnels préparer une rentrée de septembre souvent avec les moyens du bord.
La suspension des enseignements en présentiel, à la fin du mois d’octobre, avait déjà été ressentie comme la négation de tous ces efforts. La décision était d’autant plus incompréhensible que l’enseignement secondaire, les classes préparatoires et les sections de technicien supérieur conservaient un enseignement présentiel, voire des cours à effectifs complets. Le passage au distanciel à l’université n’a jamais été justifié chiffres à l’appui, et la ministre Frédérique Vidal a reconnu, à l’Assemblée nationale, que nous ne savions pas quelles étaient les conditions de diffusion du virus sur les campus (...)
Le ministère aura attendu les vacances de Noël pour publier une ordonnance permettant d’organiser des examens qui l’étaient déjà par la force des choses, ainsi qu’une circulaire dont les derniers revirements auront empêché la pleine application. Le jeudi 7 janvier, le premier ministre n’eut aucun mot pour les 2,7 millions d’étudiants dont les médias mettaient déjà en lumière le malaise, voire la détresse. Face à l’émotion suscitée par les actes désespérés de plusieurs étudiants, le gouvernement a renforcé sa communication et tente de prendre la mesure du problème. (...)