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France 24
En images : à Tijuana, la photographe Kelly Dassault montre le quotidien des migrants
Article mis en ligne le 26 janvier 2020

"Rien de plus Tijuanse que ne pas être de Tijuana", affirme une fresque peinte à même le mur qui sépare la ville mexicaine de sa jumelle américaine de San Diego. Et, en effet, la métropole de la côte Pacifique s’est développée au gré des différentes vagues de migrations, qui ont contribué à façonner l’identité de la ville. Une ville qui est désormais au centre de l’actualité depuis l’élection de Donald Trump et de sa politique de fermeté migratoire.

Habituée des lieux, la photographe Kelly Dassault publie "Zona norte", un livre de photographies illustrant le quotidien des exilés de la ville-frontière. Depuis 2014, elle s’y rend chaque année pour photographier et documenter le quotidien des migrants et des migrantes, qui tentent désespérément de rejoindre les États-Unis pour y trouver une nouvelle vie. (...)

France 24 : Pourquoi avoir choisi de photographier les migrants de Tijuana ?

Tijuana est une mine de sujets potentiels, qui peuvent parfois s’avérer dangereux. Mon idée de base était de photographier la prostitution dans la ville mais les filles elles-mêmes m’ont dit que c’était une mauvaise idée.

J’ai alors rencontré le père Chava dont l’association sert des petits-déjeuners et commencé à photographier les gens qui venaient à cette soupe populaire. Pour la plupart, ces gens venaient du reste de l’Amérique latine et tentaient soit de gagner les États-Unis, soit venaient d’en être expulsés. (...)

Paradoxalement, les choses ont plutôt évolué dans le bon sens. En 2014, les problèmes étaient gérés uniquement avec des moyens locaux. Depuis l’élection de Donald Trump cependant, des associations américaines se sont penchées sur le sujet à cause notamment de la médiatisation liée à la promesse du président américain d’y construire un mur. Un mur qui existe déjà d’ailleurs à Tijuana et a été construit par un démocrate [en 1994 sous l’administration Clinton, NDLR]. La communication permanente de Donald Trump a créé de l’intérêt pour cette zone. (...)

Désormais, il y a plein d’ONG américaines qui viennent de la ville frontalière voisine de San Diego, de Los Angeles pour aider les locaux, vacciner les gens, soigner les enfants, donner des conseils juridiques... Et, j’ai aussi l’impression qu’il y a moins de femmes et d’enfants dans la rue. (...)

je me suis rendu compte en discutant avec les gens que je photographiais que le simple fait d’être une femme dans la rue était une double peine. (...)

J’ai rencontré beaucoup d’Africains coincés à Tijuana. Ils étaient âgés d’une trentaine d’années comme moi. Beaucoup ont ce rêve presque insolite de commencer des études aux États-Unis. Ce n’est pas impossible mais je sais d’expérience personnelle qu’il faut avoir les reins solides financièrement pour le faire. Quand je les entends parler de ça, je me demande vraiment si ça va être possible pour eux.

En tant que fille d’immigrés, je sais que l’immigration signifie courir après un rêve. (...)

Mais, pour ces migrants, ce rêve n’est pas pour eux mais pour leurs enfants. Les parents sont prêts à tout sacrifier, pour que les enfants aient la possibilité d’étudier. Ils ne restent pas pour eux. Ils restent pour leurs enfants.

Qu’il s’agisse de nous, en Europe, ou des Américains, aux États-Unis, il faut que nous accueillions ces gens. (...)

Ils ne viennent pas pour profiter de la sécurité sociale ou les allocations. Ils viennent parce leur maison brûle. Personne n’expose ses enfants au danger par gaieté de cœur.