
L’économie sociale et solidaire (ESS), ce sont 2,4 millions d’emplois dans des coopératives, des mutuelles ou des associations, 10% du PIB et un ministre délégué, Benoît Hamon, qui prépare un projet de loi sur le sujet. Problème : sous prétexte d’ouvrir le secteur à d’autres entrepreneurs, le ministre serait prêt à enterrer l’une des spécificités de l’ESS : une gestion relativement démocratique des entreprises, les détenteurs du capital n’étant pas les seuls à prendre les décisions.
Un projet de loi sur l’économie sociale et solidaire sera débattu au Parlement dans quelques mois, pour assurer davantage de reconnaissance à ce secteur – qui représente 10 % du PIB et 2,4 millions d’emplois – et accompagner son développement. A la lecture du projet de loi porté par Benoît Hamon, ministre délégué à l’Economie sociale et solidaire (ESS) et à la Consommation, on reste largement sur sa faim ! On ne sait s’il vaut mieux en rire ou en pleurer...
Comment en effet ne pas applaudir à cette volonté affichée par le ministre d’offrir aux coopératives, aux mutuelles et aux associations une visibilité et une crédibilité qu’elles n’ont plus connues depuis la Libération ? Du temps où le Conseil national de la Résistance affirmait son soutien aux coopératives et aux autres démarches de solidarité et d’intérêt général. Comment ne pas se réjouir que la majeure partie des structures et des mouvements concernés par ce projet ont été consultés depuis six mois ? L’exercice n’est pas facile, tant secteur de l’économie sociale et solidaire recouvre des réalités très diverses.
Mais à parcourir le texte du projet de loi, le lecteur attentif retiendra tout d’abord que le cabinet de Benoît Hamon aura voulu proposer des bouts de réforme, répondant chacun à une revendication de l’un des secteurs concernés. Une pincée de retour aux subventions pour le mouvement associatif, un zeste de facilitation des reprises en coopérative par les salariés, deux cuillères à café d’accompagnement, par l’élargissement de la révision coopérative à toutes les structures (la révision permet aux responsables des coopérative de s’assurer que leurs structures sont restées fidèles aux principes de l’ESS)… Et j’en passe. Ce saupoudrage ne constitue pourtant pas une orientation cohérente de transformation sociale. C’est même l’inverse qui se profile. (...)
Il n’est pas trop tard pour réagir. Une alliance entre le mouvements coopératif, les réseaux mutualistes et les associations citoyennes permettrait peut-être d’inverser la tendance et de remettre l’intérêt général au cœur de ce projet de loi.
Il faut cependant reconnaître que les pistes proposées pour changer les dispositifs de la commande publique à l’égard des acteurs de l’ESS, notamment en augmentant la part des clauses sociales et environnementales dans les appels d’offre, vont dans le bon sens [4]… A condition, une fois de plus, que le parole de toutes les personnes concernées – salariés, usagers et « bénéficiaires », y compris dans le secteur de l’insertion – soit pleinement reconnue.