
La technique de test de biologie moléculaire (PCR) est fiable et maîtrisée. Une personne infectée pourra toutefois obtenir des résultats négatifs si le prélèvement naso-pharyngé n’est pas de bonne qualité ou si le virus a déjà migré dans les voies respiratoires profondes.
Après des débuts poussifs, la France semble enfin décidée à augmenter la cadence dans le dépistage du coronavirus. Alors que le nombre quotidien de tests biologiques (PCR) tournait encore autour de 5 000, il y a dix jours, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé une prochaine montée en régime, avec 25 000 à 30 000 tests quotidiens en fin de semaine et 100 000 au mois de juin. (...)
"La qualité du prélèvement, c’est 90% de la qualité d’un test", résume Bruno Pozzetto, chef du service de virologie au CHU de Saint-Etienne (Loire), où 300 dépistages du Covid-19 sont réalisés chaque jour. "Il faut enfoncer l’écouvillon jusque dans l’arrière-gorge, au-delà de la ligne des yeux. Il y a le risque de faire un peu pleurer le patient, de lui faire un peu mal, mais c’est presque un facteur de succès." Cette vidéo du New England Journal of Medicine montre toute la minutie requise pour effectuer ces prélèvements, fort désagréables pour le patient.
"C’est un geste technique, ajoute Nicolas Lévêque, chef du service de virologie du CHU de Poitiers. S’il est mal réalisé, il peut expliquer en bonne partie ce qu’on attribue par erreur à des "faux négatifs." La technicité de cette opération explique les réserves affichées par certains spécialistes face au développement des "drive-tests", pendant lesquels les personnes testées restent dans leur voiture. Mais Nicolas Lévêque n’est pas de cet avis. "Dans le département, ce sont nos collègues du laboratoire Bio 86 qui assurent ces prélèvements itinérants. Ces biologistes médicaux du privé ont l’habitude de ces gestes et j’ai toute confiance en eux." (...)
Si la charge virale est trop faible chez le patient, par exemple au tout début de l’infection, est-il possible que le test soit négatif ? La question, à ce jour, n’a pas encore été tranchée.
Des résultats négatifs quand la charge virale est trop faible ? Cela reste donc à prouver. Et même dans cette hypothèse, les tests PCR conserveraient tout leur intérêt épidémiologique. Un patient avec une charge virale infime, en effet, a moins de risque de transmettre l’infection. Le test permettrait donc toujours d’identifier les porteurs contagieux et donc de les placer à l’isolement.
De la même manière, ajoute le professeur de virologie, "il peut y avoir des différences de sensibilité entre différents kits de tests, mais je ne pense pas qu’un kit soit mauvais au point de passer à côté d’échantillons positifs".
A un stade avancé, il faut fouiller les bronchioles
A vrai dire, la principale difficulté n’est pas là. Si la qualité du prélèvement peut influencer le résultat, le timing du dépistage doit lui aussi être pris en compte. En effet, la localisation virale semble évoluer au cours de la maladie. (...)
La "migration du virus" explique que "des lavages bronco-alvéolaires [dans les bronchioles] peuvent donner des résultats positifs alors que les prélèvements à l’écouvillon donnent des résultats négatifs, ajoute le professeur. C’est d’ailleurs un phénomène déjà connu pour certaines grippes." Vincent Thibault, chef de service du laboratoire de virologie du CHU de Rennes, évoque également cet aspect sur France Bleu Armorique. "Nous faisons des prélèvements dans le nez mais on sait que le virus ne se trouve pas dans le nez à toutes les phases de la maladie." (...)
Un test négatif peut donc être lié à un dépistage trop tardif. (...)
"La détection des ARN viraux à partir de lavage broncho-alvéolaire est nécessaire pour le diagnostic et la surveillance des virus dans les cas graves", souligne une étude chinoise, encore en attente de relecture. L’endoscopie, toutefois, est une méthode difficile à généraliser et réservée aux patients les plus gravement atteints. Les auteurs de l’étude évaluent également la qualité d’autres prélèvements moins intrusifs, et soulignent la meilleure qualité des échantillons d’expectorations (entre 74,5% et 89% de résultats positifs) par rapport aux échantillons nasopharyngés (entre 53,5% et 73%) pour des tests PCR.
Il n’est toutefois pas si simple de recueillir ces expectorations. (...)
Plus étonnant encore, enfin, un test peut être négatif même chez un patient placé en réanimation avec un syndrome de détresse respiratoire. La maladie semble en effet emprunter deux chemins : une saturation des poumons en virus ou, au contraire, leur inflammation en raison d’une trop vive réaction du système immunitaire. Dans ce dernier cas, et c’est tout le paradoxe, il n’y aura plus trace de virus, souligne Nicolas Lévêque. "La technique PCR est très bonne pour détecter, à condition qu’il y ait quelque chose à détecter."