
Une semaine aura suffi pour que la chloroquine passe du statut de « fausse solution », vilipendée par la majorité du milieu scientifique, à celui de médicament candidat contre le Covid-19. De source gouvernementale, on confirme que l’autorisation accélérée d’un essai clinique de grande ampleur, supervisé par l’Inserm, va être accordée ce mardi.
Ce produit controversé rejoindra les trois candidats déjà inclus dans le vaste essai Discovery que conduit l’institut de recherche médicale dans le cadre du consortium multidisciplinaire Reacting (Research and action targeting emerging infectious diseases), qui réunit plusieurs groupes de recherche français d’excellence. Cette étude devrait porter sur 3.200 patients en Europe, dont 800 en France.
A son inauguration en mars 2018, l’IHU Méditerranée Infection de Didier Raoult n’avait pas obtenu d’Yves Lévy, alors patron de l’Inserm et encore époux de l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn, le label qui lui aurait donné une reconnaissance indiscutable. Le chercheur iconoclaste a donc dû batailler auprès du gouvernement pour faire entendre la voix de son pôle de recherche qui figure pourtant parmi les plus prolifiques du pays. (...)
L’étude Discovery, qui démarre ce dimanche, sera conduite dans une poignée de CHU (Paris, Lyon, Nantes, Lille) et progressivement étendue « à plusieurs dizaines de centres », selon l’infectiologue Jad Ghosn, qui supervisera l’essai à l’hôpital Bichat, dans le nord de Paris. Les patients seront répartis en cinq groupes : un groupe placebo traité pour les symptômes uniquement, un pour tester l’efficacité d’un médicament anti-VIH (le Kaletra), un autre qui l’associera à de l’interféron bêta pour moduler la réponse immunitaire, un quatrième pour vérifier l’effet d’un antiviral développé contre le virus Ebola (le remdesivir).
Le cinquième accédera à la chloroquine, à compter de vendredi prochain. Plusieurs centaines de patients seront intégrés « par vagues successives », en France mais aussi en Italie et en Espagne notamment. Les résultats pourraient être connus dans moins de six semaines.
Il y a urgence, car l’administration de Plaquenil, l’un des noms commerciaux de la chloroquine, se généralise sans contrôle. Sous couvert de « raisons compassionnelles » envers les familles de patients lourdement atteints, plusieurs chefs de clinique traitent déjà des malades avec ce médicament qui peut avoir des effets indésirables chez les seniors ou en association avec certaines familles d’antibiotiques. Au Maroc, le gouvernement a également décidé de passer outre les confirmations scientifiques en achetant tous les stocks de l’usine Sanofi de Casablanca pour traiter les malades.
Lire aussi :
Covid-19 : lancement d’un important essai clinique à base de chloroquine (mais aussi 4 autres traitements) !
Il y a déjà quelques semaines, nous évoquions le potentiel de la chloroquine, un traitement controversé puisque décrié jusqu’à aujourd’hui par une partie de la communauté scientifique. Didier Raoult, directeur de l’Institut Méditerranée Infection à Marseille, expliquait que la chloroquine montrait des signes d’efficacité contre le coronavirus Covid-19. Rappelons qu’il s’agit d’un traitement habituellement utilisé contre le paludisme.
Citant une étude menée en Chine, l’expert français louait les capacités antivirales et anti-inflammatoires de la chloroquine. Bien que l’étude en question n’avait pas quantifié l’efficacité du traitement, les chercheurs chinois indiquaient qu’un traitement à base de 500 mg de chloroquine par jour pendant dix jours serait suffisant. (...)
Comme l’explique Les Échos dans un article du 21 mars 2020, la chloroquine vient de devenir un candidat sérieux dans la lutte contre le Covid-19. Le gouvernement français a autorisé un nouvel essai clinique randomisé de grande ampleur, supervisé par l’Inserm et entrant dans le cadre de l’essai européen Discovery.
L’essai Discovery concernera 3 200 patients en Europe dont 800 en France. Plusieurs CHU du pays sont concernés à Paris, Lyon, Nantes et Lille mais l’essai devrait être ensuite étendu à plusieurs dizaines d’établissements. Chaque fois, les patients seront repartis en cinq groupes dont le premier concernera uniquement les symptômes (placebo). Les autres groupes testeront plusieurs remèdes comme le Kaletra (médicament anti-VIH), l’interféron bêta (modulation de la réponse immunitaire) ainsi que le Remdesivir (anti-Ebola). Le dernier groupe concernera donc la chloroquine.
Enfin, il faudra se montrer patient car les premiers résultats devraient être livrés dans six semaines minimum. L’urgence est bien là puisque l’administration de Plaquenil (un de noms commerciaux de la chloroquine) sans contrôle se produit déjà. En effet, certaines cliniques traitent les malades les plus graves avec ce médicament mais celui-ci peut avoir des effets indésirables chez les seniors.
lire aussi :
(...) Cet essai sera randomisé, c’est-à-dire que les traitements seront répartis de manière aléatoire chez les patients inclus dans l’essai, ce qui est caractéristique d’un essai contrôlé de ce type.
Quatre traitements distincts
L’essai n’utilisera pas de placebo. Yazdan Yazdanpanah évoque "quatre bras d’intervention". Il sera ainsi réparti en quatre traitements distincts parmi les 800 patients. L’un portant sur le traitement des symptômes avec de l’oxygène et de la ventilation ; un avec l’antiviral remdesivir du laboratoire Gilead, indiqué notamment dans le traitement du virus Ebola et actuellement étudié dans le cadre d’un essai clinique aux Etats-Unis contre le Covid-19 ; un avec le remdesivir associé à l’interféron bêta de Merck ; et le dernier avec le Kaletra du laboratoire Abbvie, utilisé dans le traitement du VIH.
Chloroquine
Ces choix sont dictés par les identifications de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et de l’Agence européenne du médicament (EMA). L’anti-paludique chloroquine, qui a beaucoup été présenté comme un traitement éventuel du Covid-19 n’a pour le moment pas été retenu en raison d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses avec les traitements actuels de certains patients. Pour autant, la chloroquine pourrait être ajoutée à terme, en fonction de l’évolution de l’essai. "Cet essai sera adaptatif. Dès qu’un traitement ne marche pas, on le sort du protocole", précise Yazdan Yazdanpanah. Ajoutant que les promoteurs de l’essai seront attentifs aux autres études cliniques menées ailleurs dans le monde. Ils pourraient aussi inclure d’autres traitements si de nouvelles pistes intéressantes étaient identifiées. Des discussions sont aussi en cours pour déployer cet essai à l’échelle européenne, sur 3 200 patients, dont ceux inclus dans l’essai en France. Ni les pays concernés, ni le calendrier ne sont avancés à ce stade.
8 millions d’euros débloqués par la France
Ce projet est l’un des vingt - sur un total de trente-trois soumis par les plus grands laboratoires de recherche académique en France (CNRS, Institut Pasteur, Inserm, CEA...) - retenus par Aviesan et le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. 8 millions d’euros ont été débloqués par l’Etat français et 4,6 millions d’euros obtenus de l’UE par la France pour le financement des différents projets.
Ils sont répartis en quatre catégories, dont sept en recherche fondamentale, six en diagnostic, clinique et thérapeutique, quatre en sciences humaines et sociales, et trois en épidémiologie, et menés sur tout le territoire français dans des laboratoires académiques. Les projets de vaccins n’ont pas été retenus puisque des candidats vaccins sont déjà en cours de développement et nécessitent des délais très longs. (...)
[A LA UNE A 8H]
La chloroquine pourra être administrée aux malades souffrant de "formes graves" du coronavirus, mais ne doit pas être utilisée pour des formes "moins sévères", a statué le Haut conseil de santé publique, selon le ministre de la Santé Olivier Véran #AFP 3/5 pic.twitter.com/PA0HaYHlvF— Agence France-Presse (@afpfr) March 24, 2020