
Étrange imbroglio écologique démêlé par des scientifiques aux États-Unis : quand les ours se raréfient, certains arbustes périclitent. Pourquoi ? À cause des fourmis, des pucerons et des autres insectes herbivores. Un bel exemple des relations complexes et fragiles d’un écosystème.
Un étudiant de l’université d’État de Floride, Joshua Grinath, étudiait les relations entre des fourmis et d’autres insectes dans les montagnes du Colorado quand, un été, est arrivé un ours. Installé dans le secteur, il s’est mis à ravager méthodiquement les nids de fourmis. Durant les quatre années qui ont suivi, Grinath et son collègue ont surveillé l’évolution des populations. L’ours a détruit, selon les zones, de 26 à 86 % des nids de fourmis. Les deux chercheurs ont alors noté une corrélation entre la présence de ces nids et la vigueur des arbustes, mesurée par leur croissance et le nombre de graines produites : plus il y a de fourmis et moins bien les plantes se portent.
Pour en comprendre les causes, il a fallu étudier de près le phénomène et mener des expérimentations en retirant tout ou partie des fourmis autour de certaines plantes. Le phénomène a pu être ainsi reproduit et l’hypothèse confirmée. Les fourmis ne font aucun mal à ces arbustes (Chrysothamnus viscidiflorus, de la famille des astéracées, ou composées). Mais elles éloignent des insectes prédateurs, comme les coccinelles, dont les proies habituelles sont des phytophages, croqueurs de végétaux donc. (...)
Les chercheurs remarquent également que les ours, dans ces régions, changent leur comportement alimentaire, s’attaquant plus souvent aux poubelles des humains ou aux nids de fourmis. Sans introduction ni disparition d’espèces, des modifications de comportement d’une population peuvent avoir des effets insoupçonnables sur le reste de la faune et de la flore