
Après les slogans de la rue, après les marches citoyennes, les chefs d’Etats réunis à New-york dans le cadre de l’Assemblée générale de l’ONU, ont eux aussi joint leur voix à ce concert consensuel et attendu pour le Climat. Quelques grands représentants du capitalisme se sont laissés aller, une nouvelle fois, la main sur le coeur, à de belles envolées incantatoires. Le spectacle est maintenant parfaitement rôdé. A l’occasion des grands sommets internationaux, la même pièce de théâtre se joue depuis des années avec des acteurs qui connaissent leur rôle et ne s’écartent pas d’un objectif qui leur est commun : nous vendre l’espoir d’une nouvelle phase du capitalisme, nous faire la promesse d’une adaptation rédemptrice qui permettrait à l’économie de prendre un nouveau départ et de respecter l’environnement. Le capitalisme doit évoluer et les citoyens, en particulier les jeunes, sont invités à faire pression sur les entreprises afin de précipiter une adaptation désormais urgente. . .
La plasticité et la réactivité du capitalisme ont été souvent louées aussi bien par ses partisans que par ses détracteurs ; cette formidable adaptabilité a toujours pris appui sur sa capacité à varier, à diversifier et à augmenter ses sources et ses méthodes de prédation. L’exploitation de ses deux ressources fondamentales, la nature et l’homme, n’a jamais fait défaut et s’est poursuivi depuis le début de la civilisation industrielle, avec ingéniosité et créativité ; les deux mamelles du capitalisme, ne se sont jamais taries. Au cours des siècles, le capitalisme a su saisir de nouvelles opportunités de profit en accaparant des secteurs jusque là épargnés par son appétit ou en développant, grâce au progrès technologique, de nouvelles sources d’énergie. Malgré les crises qui émaillent son parcours, comme la dernière secousse financière de 2008, l’ordre dominant s’en est plutôt bien sorti : les possédants, les riches, ont globalement prospéré et les pauvres se sont multipliés sans trop broncher, assommés - notamment dans les pays du Nord - par le matraquage publicitaire, étranglés par les remboursements d’emprunts et les crédits à la consommation, patientant dans l’espoir d’une amélioration de leurs conditions d’existence. .
Et la classe ouvrière, fragilisée par sa fragmentation, manipulée, trompée et désinformée par les médias dominants, n’a plus vraiment conscience de sa force. La société moderne produit des individus isolés et désarmés.
Et puis, le super prédateur a toujours été aussi un super vendeur : encore un petit effort et la croissance aidant, il sera bientôt possible de mieux répartir les richesses, de redistribuer plus équitablement, d’assurer un meilleur avenir aux jeunes générations. . .
Il sera bientôt possible de s’engager véritablement dans une transition écologique et sociale. . .
Mais aujourd’hui, les capitalistes peuvent être inquiets car ce discours ne tient plus. La nature se rebiffe et compromet la poursuite d’une exploitation outrancière. L’horizon est en train de s’assombrir définitivement et l’espoir d’une vie meilleure pour les générations futures se dérobe. Le désenchantement grandissant des classes populaires menace le système. Jusqu’à présent, seuls les jeunes de banlieues étaient concernés par la désespérance et le rejet global d’une société qui ne leur permet pas d’espérer une réelle promotion sociale et une vie digne. Désormais, le rejet du système progresse dans les esprits car il est clair pour de plus en plus de monde que le capitalisme dérégulé et mondialisé nous mène à une impasse. Une économie tournée vers la compétition permanente, est incompatible avec le partage, la coopération et la solidarité nécessaires à l’émergence d’une société respectueuse de la vie et des aspirations légitimes de sa population. Face à la montée des revendications écologiques et sociales le gouvernement oppose son bréviaire de certitudes néolibérales mais également une répression de plus en plus féroce.
Emmanuel Macron et son gouvernement, qui ont compris le danger, font tout leur possible pour empêcher une convergence des luttes qui résulte du même constat implacable : le système porte en lui-même, comme une évidence, son impossible adaptation au réchauffement climatique et à la transition écologique et sociale qu’il prétend mettre en place.
Quand un Président en est réduit à suggérer à ses opposants “qu’ils aillent manifester en Pologne ”, son impuissance à résoudre la crise est flagrante !