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Christophe collomb découvre l’amérique : au premier jour d’un ethnocide
Article mis en ligne le 12 octobre 2018

Le 12 octobre 1492 Christophe Colomb découvre pour le compte de la couronne d’Espagne ce que l’on connaîtra bientôt comme le nouveau monde. Lui pensera jusqu’à sa mort avoir découvert la route des indes par l’ouest. A partir de ce jour, l’Occident qui découvrait tout juste l’existence de ce continent va se lancer dans une vaste opération de conquêtes coloniales. Entre sa découverte par Colomb et le XIXe siècle, la population autochtone d’un vaste continent va diminuer de 95% [1]. La disparition des populations due à de multiples facteurs (maladie, guerre, exploitation) s’accompagne d’une volonté de destruction systématique des cultures autochtones par les colonisateurs.

En réalité la première découverte est bien plus ancienne on estime que les premiers Humains découvrent l’Amérique il y a vraisemblablement 15 000 ans à partir du continent européen en passant par le Groenland. Ces premiers arrivants se lancent à la découverte de l’Amérique et iront, de génération en génération, peupler le continent jusqu’au sud. Deux autres vagues de peuplement suivront par le nord en provenance d’Asie, mais ces nouvelles populations n’iront cette fois pas plus loin que les actuels États-Unis [2]. Il y a relativement peu de données sur la croissance démographique entre ces vagues d’arrivées et la découverte des Amériques par la couronne d’Espagne, toujours est-il qu’à l’arrivée des européens la population du continent représente 80 à 100 millions de personnes [3].

Après cela, on sait que les Vikings ont foulé le sol de ce continent aux alentours de l’an 1000. On sait aussi qu’à peu près à la même époque un savant Persan Abu Rehan Al-Biruni a déduit après avoir calculé la taille de la terre l’existence d’un autre continent en 1037. Enfin aux alentours de 1474, Juan Scolvus un capitaine Norvégien découvre une voie vers ces nouvelles terres en passant par le Groenland pour le compte de Christian 1e du Danemark, personne n’y prendra garde [4]. Pour le reste tout un tas de théories, jusqu’aux plus farfelues, circulent sur la question [5] .

L’occident chrétien n’entendra en tout cas jamais parler de ce continent jusqu’à cette découverte fortuite le 12 octobre 1492. La portée de la chose n’est pas comprise tout de suite. (...)

C’est la volonté primaire d’accumulation de capital de la noblesse ibérique qui va faire une place dans les livres d’Histoire à ce savoir. Quand débute cette ruée vers l’or c’est toute la structure sociale des deux continents qui en est radicalement changée.

Au fil des siècles le rôle idéologique de l’Église dans cette affaire sera déterminant du fait de son influence quasi hégémonique sur la pensée occidentale à ce moment. Les idées d’évangélisation et d’universalité du message chrétien joueront un rôle important dans le déroulement de la conquête coloniale de l’Amérique. C’est au sein de l’Église que vont se dérouler les débats qui vont faire des populations rencontrées sur place des sauvages qui ne sachant pas se gouverner ne sauraient revendiquer la souveraineté sur une terre. Dans la logique de l’Église, c’est aux chrétiens d’assurer l’évangélisation des terres ainsi découvertes et donc de leurs souverains. C’est au nom de l’Église que des massacres seront commis, mais c’est aussi au nom de l’Église que d’autres les condamneront. (...)

Le 7 juin 1494 à Tordesillas, l’Espagne et le Portugal se sont partagés ce qui sera bientôt officiellement un nouveau continent. En effet, malgré les rencontres avec des populations indigènes dont font état les rapports des premiers marins, les terres découvertes sont déclarées Terra nullius [6], et sont partagées entre les deux belligérants - dans un premier temps par le Pape. (...)

Les premiers temps de la colonisation du continent concernent donc principalement les royaumes d’Espagne et du Portugal. Les colons s’appuient sur leur force brute mais aussi, profitant des dissensions au sein des cultures autochtones, sur des alliances avec les minorités locales [8] . Les alliés d’un jour seront une fois le pouvoir installé considérés comme des vassaux, les ennemis n’auront pas le droit à ces égards. Les populations conquises seront traitées comme du bétail [9], directement passées par les armes ou bien massacrées dans des camps de travail. Des populations entières meurent dans des mines dès les premières années de la découverte, permettant à la noblesse espagnole d’effectuer un gigantesque transfert de ressources entre le nouveau continent et le coffre de la couronne d’Espagne. Entre 1500 et 1800, 80% de l’extraction de métaux [10] se passe aux Amériques [11], principalement pour le compte de la couronne d’Espagne.

La noblesse espagnole va principalement se tourner vers le commerce extérieur pour écouler ces ressources rapidement acquises. Ces nombreux achats à l’extérieur qui s’accompagneront d’une faible progression de l’appareil de production ibérique vont a l’inverse alimenter les industries productrices en Angleterre, en France et en Italie. Dans le même temps cet or va accompagner le développement des banquiers. Les banquiers lyonnais tirent relativement bien leur épingle du jeu, et les coffres des banques de la ville voient affluer les devises rassemblées grâce à des prêts émis dans le cadre du commerce avec le nouveau monde.(...)

Controverse théologique
Dans un premier temps, les habitants des terres nouvellement découvertes sont des barbares envers lesquels les souverains des pays colonisateurs n’ont aucune sorte de devoirs et il faut attendre le 9 juin 1537 pour que le pape Paul III intègre ces populations à l’Humanité. Dans la Bulle pontificale Sublimis Deus l’Église rappelle officiellement que les indiens aussi sont des Humains et qu’il appartient donc aux chrétiens de les évangéliser. [12] Si par ce geste les habitants de ces terres deviennent des humains, ce sont toujours des mécréants et il devient nécessaire, puisque c’est la mission des chrétiens, de se demander comment les convertir. C’est au milieu de ces controverses qu’intervient la controverse de Valladolid sous l’autorité de Charles Quint et des papes Paul III (1534-1549) puis Jules III (1550-1555). Celle-ci oppose, avec l’arbitrage d’un représentant du Pape, B. de Las Casas, qui se pose en avocat des peuples autochtones, à Sepúlveda entre août 1550 à mai 1551.

Il s’agit de décider comment devront à l’avenir être traité les habitants originels des Amériques nouvellement découvertes.(...)

Le résultat de la controverse est en demi teinte, "elle ne reconnaîtra l’humanité des Indiens qu’en la refusant aux noirs d’Afrique". La solution envisagée "préserve les enjeux économiques et politiques de la colonisation tout en endormant provisoirement la mauvaise conscience catholique." [14] C’est cette séparation entre bon sauvage amérindien et mauvais sauvage africain qui va ouvrir la voie à l’achat massif d’esclaves en Afrique et leur déportation que nous connaissons aujourd’hui sous la formule euphémique de "commerce triangulaire". (...)

Les Tainos un peuple de culture Arawaks vivant sur l’ile de San salvador, la première sur laquelle Colomb a posé le pied [15], vont être le premier groupe "génocidé" de l’histoire de l’Amérique. (...)

devenir un désert que le colons abandonnèrent.

Controverse mémorielle : Génocide ou Ethnocide
Il existe un débat [19] autour de la qualification de ce qui est arrivé aux peuples et cultures de l’Amérique. On pourrait, avec une certaine mauvaise foi simplificatrice, résumer la discussion en disant que les tenants de la thèse du génocide accusent les autres de minimiser l’ampleur du désastre qui intervient durant ces 5 siècles. A l’inverse les seconds accusent les premiers de dénier aux amérindiens la qualité de sujet de l’Histoire de l’Amérique. Les amérindiens ne seraient plus que les objets de cette histoire de la conquête de l’Amérique par l’occident. Comme si quelque millions d’occidentaux avaient pu, par la seule force du fer (et la supériorité du capitalisme), massacrer 90 millions de personnes.

Au moment d’écrire ce texte je pense que si il y a bien une stratégie systématique des classes dominantes en Europe de destruction des cultures locales en vue d’offrir toujours plus de terres à la spéculation et de sujets à l’exploitation. Volonté qui accompagne la formation de ce que nous appelons le capitalisme. Les massacres aussi importants soient-ils résultent le plus souvent de l’expression du déni de l’Autre à l’échelle locale. Si génocide il y a eu, c’est culture par culture au gré des conquêtes et non selon un plan généralisé pour les cultures amérindiennes envisagé comme un tout. C’est une succession de choix pris tout au long de l’histoire de la conquête coloniale non selon un plan défini par le haut mais comme des moments d’expression radicale de l’idéologie dominante. En disant cela il ne s’agit pas de nier l’horreur de cette histoire mais bien de rendre évident que dans cette affaire c’est la même logique qui engendre les massacres et les tentatives d’assimilation des populations autochtones.