
(...) Notre époque ressemble à ces moments où l’humanité est comme hypnotisée par une force que personne ne peut contrer, explique l’éditorialiste. Une époque dans laquelle les mots n’ont plus d’impact, et où l’écriture est aussi impuissante qu’un canoë pendant la tempête. Pire, les avertissements précipitent la chute :
« Les alertes sur le danger à venir ont l’air des derniers gémissements des profiteurs d’un système décadent, en train de se désagréger. La réponse est dans le mouvement. Le mensonge est la nouvelle vérité. La chorégraphie est plus importante que le contenu. Le monde est sens dessus dessous. »
Il nous faut dire au revoir à tout cela. Au revoir à ce monde né des cendres de la Seconde Guerre mondiale, où dominaient les traités, de nouvelles institutions, et qui a vu la naissance de l’Union européenne, prophétise le New York Times. À la place s’est levé un tyran à la face cramoisie, orchestrateur d’hystéries collectives, qui promet qu’il nous protégera de Daech comme des migrants, écrit l’éditorialiste.
Les faits, de « petits désagréments »
La fin de cette ère a d’abord été signalée en 2014, lorsque le président russe Vladimir Poutine annexa le Crimée, en violation de l’article 2 de l’ONU sur le respect de l’intégrité territoriale des Etats. Une violence accompagnée de nombreux mensonges, dans le plus pur style soviétique dont Poutine est le digne héritier. « Deux plus deux égalent cinq » était le slogan de l’Union soviétique en 1931, fait remarquer le New York Times.
Le deuxième signal de la fin de cette époque aura été donné par le discours d’investiture de Donald Trump à Cleveland, le 21 juillet 2016. Un discours truffé d’erreurs, de mensonges et d’approximations, qu’il a débuté par cette promesse en forme de doigt d’honneur : « Il n’y aura aucun mensonge. » Deux plus deux égalent cinq. Ce qui fait dire à Roger Cohen que « les faits ressemblent à cette charmante sensation de gueule de bois, au lendemain d’une époque où le discours rationnel dominait. Des petits désagréments dont on se débarrasse facilement ». (...)