Depuis que l’on mesure la température, jamais sa moyenne annuelle n’a été aussi élevée en France. À l’échelle mondiale, les quatre dernières années sont les plus chaudes jamais enregistrées. La concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère fait peser le risque de franchir un seuil d’emballement du climat.
Quels sont les facteurs explicatifs de cette année exceptionnellement chaude ? Le nord de l’Europe, observe Météo France, a vécu de fréquentes situations de type « régime scandinave », c’est-à-dire des hautes pressions centrées sur la Scandinavie. « Ce temps a favorisé l’apport d’air continental particulièrement sec et chaud, d’avril à septembre », note François Jobard. (...)
Mais ce phénomène n’explique pas tout. Certes, la variabilité naturelle « fait osciller les températures d’une année sur l’autre, dit le climatologue Hervé Le Treut, mais ce que nous observons depuis un demi-siècle, de manière frappante, c’est une hausse régulière des températures, très corrélée au fonctionnement de nos sociétés et à l’accumulation des gaz à effet de serre émis mondialement ».
D’après les mesures de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), institution spécialisée des Nations unies, les gaz à effet de serre atteignent des records de concentration dans l’atmosphère terrestre. Or, l’intensification de l’effet de serre, due aux émissions humaines de gaz à effet de serre (GES), constitue la force motrice principale du changement climatique observé depuis un demi-siècle. (...)
Les conséquences de ce réchauffement planétaire sont « lourdes, innombrables et inégalement réparties à travers les régions du monde, explique Hervé le Treut. Les grandes calottes glaciaires groenlandaises et antarctiques fondent et provoquent une élévation du niveau des mers. Les équilibres écosystémiques sont très perturbés. Les vagues de chaleur, les sécheresses et les précipitations sont plus fréquentes et extrêmes, tout comme le risque de voir des évènements météorologiques puissants se produire ». (...)
face à ces dérèglements, il faut raisonner sur des faisceaux de présomption. Et nous sommes certains que le changement climatique amplifie fortement les risques. »
Selon le cinquième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), si rien n’est fait pour inverser la tendance actuelle en matière d’émissions de gaz à effet de serre, d’ici la fin du siècle un épisode tel que la canicule de l’été 2003 deviendrait courant en France, voire serait régulièrement dépassé, en intensité et en durée. (...)
la hausse des températures fait peser un risque « inadmissible » sur la santé actuelle et future des populations du monde entier : elle augmente notamment le nombre de chocs cardiovasculaires liés aux canicules, la propagation de virus et les pénuries alimentaires. (...)
le risque d’un emballement est bien réel. On peut imaginer qu’à un moment donné, à force d’abîmer la biodiversité, de réchauffer l’atmosphère, les écosystèmes ne s’adaptent plus et ne remplissent plus leurs fonctions. Il n’est alors pas exclu que nous passions, dans le futur, différents seuils d’emballement. »
2018 fait désormais partie du passé. Qu’en sera-t-il pour les années à venir ? « Il peut y avoir des fluctuations, des années moins chaudes que d’autres, mais ça continuera de monter, même en dent de scie », dit François Jobard. Les premiers résultats amers de 2019 émanent de l’Antarctique. La surface occupée par la banquise, au 1er janvier 2019, était de 5,468 millions de km². Elle n’avait jamais été aussi peu étendue à cette période de l’année. (...)
D’où l’urgence, pour l’humanité, de réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre. Selon les scientifiques du Giec, les émissions nettes de CO2 doivent atteindre zéro à l’horizon 2050 pour stabiliser la température terrestre en dessous de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. En d’autres termes, la quantité de CO2 entrant dans l’atmosphère doit être égale à la quantité de CO2 éliminée par les puits naturels (océans et forêts) ou technologiques (captation du carbone atmosphérique), et ce afin de limiter les dégâts du changement climatique sur les écosystèmes et les sociétés humaines.
Mais l’humanité est loin d’une telle trajectoire