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Au Canada, des petites chaussures pour dénoncer l’horreur des pensionnats autochtones
Article mis en ligne le 6 juin 2021

"Je suis ici pour défendre mon peuple", dit Stéphanie Gutierrez, au bord des larmes. Mercredi, elle a symboliquement déposé 215 paires de chaussures d’enfants devant le tribunal de Kamloops, une semaine après la découverte des restes d’autant d’élèves du pensionnat autochtone de cette ville de l’ouest canadien.

La jeune femme, membre de la Première nation Sto:lo, serre dans ses bras le portrait de sa grand-mère, aujourd’hui décédée, et qui a été internée de force pendant trois ans dans ce pensionnat. Derrière elle, les briques rouges de cet établissement se dressent comme une ombre sur le ciel.

Chaque jour depuis la découverte des restes des 215 enfants, des habitants se rendent à un mémorial qui y a été érigé pour y déposer messages de soutien, jouets et chaussures d’enfant.

"Je suis ici aujourd’hui pour défendre mon peuple, ma grand-mère et ceux qui ne peuvent pas parler, parce que c’est une telle tragédie, c’est inimaginable. Des choses inimaginables sont arrivées ici, dans cette école", dit-elle à l’AFP.

"Ce sont 215 lignées familiales qui ont été perdues, volées. Ces enfants ont été volés, ils ont été enlevés à leurs familles, ils ont été torturés, et ensuite ils ont été assassinés", déplore-t-elle.

"Je veux que le Canada comprenne, et je veux que les gens sachent d’où vient cette douleur. Cette douleur vient de cette école, des gens qui ont maltraité ces enfants. Ils leur ont fait tellement de choses tragiques... 215 enfants sont morts ici, et il y en a probablement davantage".

Ce pensionnat, situé sur le territoire de la communauté autochtone de Tk’emlúps te Secwépemc, à quelques centaines de kilomètres de la métropole de Vancouver, sur la côte Pacifique, a été le plus gros pensionnat autochtone au Canada. Il a accueilli jusqu’à 500 élèves dans les années 1950.

Créé en 1890 et géré par l’église catholique puis par le gouvernement fédéral, il a fermé ses portes en 1977. D’autres pensionnats, près de 140 au total, ont perduré jusqu’à la fin du XXème siècle aux quatre coins du Canada.

L’église et le gouvernement canadien, assurant vouloir "civiliser" les enfants autochtones en leur inculquant les valeurs occidentales, les retiraient de leur communauté et les plaçaient dans ces pensionnats où nombre d’entre eux ont subi des sévices physiques et sexuels. Des milliers d’entre eux sont morts ou ont disparu, selon le rapport d’une commission d’enquête.

La découverte de ces corps d’enfants a ravivé la colère des communautés autochtones, malgré les tentatives des gouvernements canadiens successifs de se réconcilier avec eux. (...)