
En 1986, l’explosion de ce lac de cratère tuait 2 000 personnes, asphyxiées par le gaz carbonique, dans cette région dans le nord-ouest du Cameroun. Trente ans plus tard, la région, toujours meurtrie, revient lentement à la vie.
(...) Cette nuit-là, dans une région montagneuse des Grassfields, dans le nord-ouest du Cameroun, à 320 kilomètres de la capitale Yaoundé, l’explosion subite du lac Nyos, un lac de cratère perché à 1 100 mètres d’altitude, laisse échapper plus d’un kilomètre cube de gaz carbonique. Près de 2 000 personnes meurent asphyxiées dans leur sommeil, tout comme plusieurs milliers de bovins, dans un rayon de 20 kilomètres. C’est la plus grande catastrophe naturelle qu’ait connue le pays (...)
"« Nyos ne doit pas être oublié, nous vivons comme des réfugiés, comme des gens perdus »", ajoute l’instituteur. Autour de l’école, un ensemble d’une centaine de cases disséminées dans la vallée, chacune étouffée par de hautes herbes qui servent aussi de pâturage au bétail.
"« Nous sommes obligés de nous cacher sur nos propres terres »", s’énerve Bouba Hassan Namodji, pour expliquer la broussaille devant les maisons. (...)
Car, après la catastrophe, le gouvernement a interdit l’accès et installé les survivants dans des camps à une centaine de kilomètres de la région. En novembre, cette interdiction a été réitérée après la publication des recherches d’une équipe de scientifiques japonais indiquant que "« le danger n’est pas écarté »". "« Nyos est situé au-dessus d’une poche magmatique. Il existe des lignes de failles qui partent de cette poche et entrent en contact avec le fond du lac. C’est une zone de volcanisme actif. Les émanations gazeuses s’accumulent donc en permanence »", a expliqué le géochimiste Minoru Kusakabe qui a dirigé l’équipe de chercheurs.
"« Depuis trente ans, il ne s’est plus rien passé. Cela veut dire qu’il n’y a plus rien, veut pourtant croire Asta Bami, qui égrène du maïs devant sa maison entourée de ses enfants. Le gouvernement nous interdit de revenir chez nous, mais il a reconnu l’école et a fait construire un puits. Alors, quel est le problème ? »" (...)
La catastrophe du lac Nyos reste une énigme. S’il ne fait plus de doute que c’est l’explosion d’un nuage de gaz carbonique qui en est à l’origine, elle a pourtant donné lieu à une bataille homérique entre deux scientifiques très médiatiques à l’époque. Le Français Haroun Tazieff, qui défendait la thèse d’une éruption volcanique de gaz ayant abouti à la libération de CO2, et l’Islandais Haraldur Sigurdsson, soutenant la thèse limnologique : un dégazage des eaux du lac chargées en CO2 du fait de la présence du volcan. Le second remporta le duel. (...)
selon les spécialistes, la quantité de gaz contenue dans le lac Kivu est proportionnelle à sa taille imposante : une surface de près 2"700 km2 et 480 mètres de profondeur. Un danger encore plus colossal que celui qui a failli rayer Nyos de la carte." (...)