La dissolution du mouvement écologiste était devenue une revendication du syndicat agricole. La FNSEA pointe désormais la participation de la Confédération paysanne aux actions des « SLT ».
Depuis l’annonce de la dissolution des Soulèvements de la Terre (SLT), la FNSEA fait profil bas. Son président Arnaud Rousseau fuit les interviews, et ses responsables départementaux ont pour consigne de ne « pas commenter la décision » prise contre le mouvement écologiste. « L’[échelon] national a été entendu là-dessus. Nous, on a juste demandé que les faits de vandalisme [survenus lors des manifestations contre les carrières de sable, les 10 et 11 juin – ndlr] soient condamnés, affirme Sébastien Berger, président de la fédération départementale (FDSEA) de la Vienne à Mediapart. Notre président national a fait remonter les informations au ministère en disant qu’il fallait des actes. Après, M. Darmanin est assez grand pour prendre ses décisions tout seul. »
« Des actes », Arnaud Rousseau en a demandé publiquement au gouvernement, jeudi 15 juin, dans les colonnes du Point. Il précise qu’un rendez-vous est pris avec le ministre de l’intérieur « dans les prochains jours ». Et puis, mystère. La rencontre, si elle a eu lieu, demeure confidentielle. (...)
« Comment se fait-il qu’on n’ait pas dissous la FNSEA lorsqu’elle a détruit et saccagé le ministère de l’écologie ? José Bové, ancien porte-parole de la Confédération paysanne (...)
Pour José Bové, ancien porte-parole de la Confédération paysanne, la dissolution des SLT témoigne « d’une dérive autoritaire » qui n’a « absolument aucun sens », si ce n’est « d’imposer les intérêts d’une minorité d’agri-managers ». (...)
« Comment se fait-il qu’on n’ait pas dissous la FNSEA lorsqu’elle a détruit et saccagé le ministère de l’écologie ? », questionne l’ancien leader. (En 1999, la cour du ministère est dépavée et le bureau de Dominique Voynet vandalisé, quatre mis en cause écopent de peines d’amende.) « N’oublions pas des saccages de centres-villes, de préfectures... Tout ça aurait pu justifier pourquoi pas une dissolution de la même manière. Jamais je ne demanderais la dissolution d’une organisation syndicale, mais il faut remettre les choses à l’endroit. La FNSEA cherche à empêcher toute contestation de son modèle, en faisant peur à tous ceux qui s’y opposent, en demandant la dissolution des mouvements. Demain, ils vont demander la dissolution de la Confédération paysanne, pourquoi pas ? » (...)
L’enjeu du modèle agricole
Signe des temps, la « Fédé » a signé, avec les Jeunes agriculteurs, en décembre 2019, une « convention de partenariat » avec le ministre de l’intérieur – alors Christophe Castaner – et la direction de la gendarmerie pour la « sécurisation des exploitations ». L’accord, aujourd’hui suspendu par le tribunal administratif, prévoit que les deux syndicats « communiquent des renseignements » à la gendarmerie, et qu’une cellule spécialisée, Demeter, protège aussi « le milieu agricole » des « actions à caractère idéologique ».
La pomme de discorde, « c’est le modèle agricole qu’on veut », concède Mickaël Trichet, qui a subi l’intrusion de militants antispécistes sur son élevage. (...)
Pourtant, les responsables de la FNSEA sont obligés de l’admettre, leur organisation a elle aussi son histoire de contestation violente, d’affrontements, de destructions ou de sabotages. (...)
« Je crains que cette décision de dissolution n’exacerbe la violence, juge Laurence Marandola, la porte-parole de la Confédération paysanne. Si le gouvernement et les décideurs politiques ne choisissent pas le dialogue sur la planification écologique et le plan eau, on va continuer à aller dans le mur sans répondre à aucune question. »