
Près de 200 milliards d’euros. C’est le montant des aides publiques versées aux grandes entreprises privées sans aucune contrepartie. Ce montant a été révélé par une étude de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) et du Clersé (groupe de chercheurs de l’université de Lille). Il s’agit du premier budget de l’État : plus de 30% de son budget total, et deux fois plus que le budget de l’Éducation nationale. Subventions directes, niches fiscales et sociales en tout genre ou encore aides régionales et européennes, ces 200 milliards prennent des formes diverses, mais ont une même finalité : partir en poussière chez des intérêts privés, plutôt qu’au service de la collectivité.
Près de 200 milliards d’euros. C’est le montant des aides publiques versées aux grandes entreprises privées sans aucune contrepartie. Ce montant a été révélé par une étude de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) et du Clersé (groupe de chercheurs de l’université de Lille). Il s’agit du premier budget de l’État : plus de 30% de son budget total, et deux fois plus que le budget de l’Éducation nationale. Subventions directes, niches fiscales et sociales en tout genre ou encore aides régionales et européennes, ces 200 milliards prennent des formes diverses, mais ont une même finalité : partir en poussière chez des intérêts privés, plutôt qu’au service de la collectivité. (...)
D’où viennent ces 200 milliards ?
Le gâteau des aides aux entreprises a considérablement grossi ces dernières années : l’État accorde 3 fois plus d’aides au secteur privé qu’en 1999. Et ce gâteau se découpe en plusieurs parts. Le magazine Frustration fournit un graphique de la répartition de ces aides. C’est environ 20% de subventions directes de l’État ou des collectivités, 40% d’exonérations de cotisations sociales, et 40% de niches fiscales et baisses d’impôts. (...)
Ces milliards d’aides ne tombent pas du ciel. Ils résultent très nettement des politiques des gouvernements libéraux depuis les années 2000. En particulier, des politiques d’Emmanuel Macron depuis 2017 et même avant, à la tête de l’Économie de François Hollande. Avant lui, les politiques de réduction des cotisations patronales des entreprises ont pavé le chemin sous Nicolas Sarkozy. Ensuite, le grand bond en arrière : la mise en place du Crédit d’Impôt Compétitivité Recherche (CICE), qui a coûté à l’État plus de 100 milliards depuis 2013.
Sa suppression permettrait de rapporter 10 milliards d’euros, a minima. La baisse pérenne des cotisations sociales est venue remplacer le CICE en 2019 par Macron, pour le même effet. D’autres dispositifs encore : le Crédit impôt recherche (CIR : sa suppression pour les grandes entreprises rapporterait 1.3 milliard), ou encore le Pacte de Responsabilité (un ensemble de différents crédits d’impôts mis en place en bloc par François Hollande).
Sous Macron, ces dispositifs perdurent et s’étendent. Ils cohabitent surtout avec d’autres milliards tendus par Macron aux entreprises. Par exemple, Macron a décidé seul de supprimer la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui bénéficiait aux collectivités territoriales, et de les rendre dépendantes aux recettes de la TVA, l’impôt le plus injuste. Ce nouveau cadeau aux grandes entreprises coûte cette année 12 milliards d’euros, et coûtera 15 milliards en 2027.
D’innombrables niches sont encore en vigueur (...)
200 milliards pour licencier ?
Problème majeur : ces milliards d’aides aux entreprises se font sans contrepartie aucune. Bien souvent, elles permettent et encouragent même les attaques sociales des entreprises envers leurs salariés : baisses des salaires, licenciements, délocalisations, etc. (...)
Résultat direct et rationnel de l’absence de conditionnement social (et écologique) de ces aides publiques, les entreprises font ce qu’elles veulent de cet argent. (...)
Pour continuer d’arroser les entreprises, le Gouvernement fait les poches aux français
Alors que le chantage à la dette et à la compression des dépenses repart de plus belle avec l’annonce des 5.5% de PIB de déficit, la responsabilité de ces 200 milliards d’aides est immense. Le Gouvernement détourne les yeux de cette responsabilité et préfère concentrer ses attaques ciblées sur les dépenses sociales et les services publics. (...)
Selon les mots de l’étude de l’Ires, « un État-providence caché en faveur des entreprises » se développe à l’heure où le Gouvernement détricote l’Etat-providence social. Romaric Godin résume la situation dans un article sur le chantage à la dette pour Mediapart : « L’épouvantail de la dette a pour fonction de démanteler ce qui reste de l’État social pour préserver les transferts vers le secteur privé et soutenir sa rentabilité face à une croissance stagnante.«
Plus encore, pour Benjamin Lemoine, sociologue et auteur de l’ouvrage L’Ordre de la dette (2022) : « Le maintien de l’ordre de la dette demande un dosage incessant entre le soutien au capital privé et une capacité à assurer sans chocs politiques le service de la dette, et depuis des années cette capacité repose entièrement sur le sacrifice de l’État social.« (...)
Conditionnement des aides, suppression des niches fiscales inutiles : les recettes fiscales existent
Un autre modèle est pourtant possible. Toutes les études sur les aides aux entreprises parlent d’une même voix : il faut conditionner les aides. Elles rejoignent ainsi les revendications de la France Insoumise depuis des années. (...)
Une chose est certaine : il existe, effectivement, de nombreux postes de dépenses sur lesquels le Gouvernement pourrait se pencher pour réduire le déficit public. Conditionner les aides aux entreprises paraît être une étape essentielle.