Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Mediapart
Un rapport accable la faculté de médecine de Lille après le décès d’un étudiant lors d’un bizutage
#bizutage #medecine #Lille
Article mis en ligne le 8 septembre 2024
dernière modification le 6 septembre 2024

Mediacités révèle un rapport ministériel très critique sur l’omerta entretenue par l’université lilloise autour des bizutages. En 2021, un étudiant avait trouvé la mort après une soirée d’intégration.

Lille (Nord).– Dans la nuit du 8 au 9 juillet 2021, Simon Guermonprez, tout juste admis en deuxième année de médecine, chute mortellement depuis un pont autoroutier au retour d’une soirée étudiante. Le mercredi 4 septembre 2024, quatre personnes devaient être jugées devant le tribunal correctionnel de Lille : le conducteur qui l’a percuté, mais aussi trois étudiants accusés d’avoir contribué à faire boire les étudiants. (...)

Le processus d’« intégration » des étudiants de la faculté Henri‐Warembourg est en effet régulièrement le théâtre de bizutages, comme l’ont montré nos précédents articles. Or, une enquête administrative réalisée par l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) après la mort de Simon Guermonprez, remise au ministère de l’enseignement supérieur en mars 2022, critique vertement la gestion par l’université de Lille et la faculté de médecine de plusieurs affaires graves. (...)

« Non seulement par leur attitude, l’université comme l’UFR n’ont pas mis fin à des pratiques inadmissibles et condamnées par la loi mais [elles] ont au contraire, de fait, contribué à leur pérennisation – et même à leur amplification », dénonce ce document, que Mediacités a pu consulter malgré les tentatives acharnées du ministère pour éviter de nous le communiquer (...)

Outre l’accident mortel de juillet 2021, les inspecteurs ont identifié plusieurs dérives récentes. Parmi elles, trois blessés admis aux urgences en juillet 2020 lors de la « pré‐intégration » à la Citadelle de Lille pour un choc violent à la tête, une coupure par impact de bouteille et des brûlures au torse. Au moins deux victimes ont porté plainte. Lors du même événement un an plus tard, « un ou deux groupes “radicaux” sont venus avec des voitures épaves, “fonçant” dans la foule “pour rire” », notent les auteurs.

Les inspecteurs affirment aussi que, le soir du décès de Simon Guermonprez, « plusieurs parents sont partis à la recherche de leur enfant et les ont retrouvés en situation de grande détresse. Certains n’auraient été retrouvés que grâce à la localisation de leur téléphone portable ».

Absence de sanctions après des plaintes pour viol (...)

Les inspecteurs généraux indiquent que le doyen a lui‐même déposé plainte dans le premier cas et signalé le viol présumé au procureur de la République dans le second. En revanche, l’université n’aurait jamais pris de mesures conservatoires ou de sanctions à l’égard d’étudiants pour des faits de bizutage ou des violences sexistes ou sexuelles, contrairement à « des faits liés aux examens ou aux stages ». Et ce, même quand les responsables de l’UFR connaissaient les auteurs présumés et que des procédures judiciaires étaient en cours. (...)

La « non-collaboration » de la faculté

Les auteurs de l’enquête administrative reprochent par ailleurs à l’université sa « non‐collaboration » lors de leur mission, qui contribue de leur point de vue à « l’omerta » autour du bizutage. (...)

«  C’est à l’extérieur de l’université, c’est malheureux mais on n’y peut rien, c’est privé et ce sont des adultes » : voilà en substance la ligne tenue par l’établissement, telle que résumée par le rapport. Plutôt que de détourner le regard, sa direction devrait au contraire mettre en place, selon l’Inspection générale, « des mesures conservatoires de protection pour les étudiants concernés », « déclencher systématiquement une enquête interne dès que l’université a connaissance de faits graves durant des événements festifs d’intégration, qu’ils soient organisés par elle ou non », et « saisir la section disciplinaire de l’université ». Le seul moyen de faire cesser un bizutage désormais bien ancré dans la vie de l’établissement. (...)