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le vent se lève
Tri social des élèves et abandon des profs : le programme commun de Macron et du RN pour l’école
#ecole #enseignement #Macron #RN #electionslegislatives
Article mis en ligne le 26 juin 2024
dernière modification le 24 juin 2024

Alors que l’Education nationale s’effondre, le Rassemblement National promet un « redressement » de ce service public en reprenant les mêmes recettes que le camp présidentiel. Généralisation du tri social dès le plus jeune âge, obsession pour les sanctions, destruction du collège unique, enseignement privé florissant hors de tout contrôle… Les deux partis ont pratiquement un programme commun sur la question, dont l’enjeu des moyens accordés aux enseignants est quasi-absent. A l’inverse, le Front populaire entend lancer un choc de moyens pour l’éducation dès son arrivée au pouvoir, avec le double objectif d’une école vraiment gratuite et beaucoup plus égalitaire. (...)

Une école de plus en plus dysfonctionnelle et inégalitaire

Contrairement aux propos lénifiants des macronistes sur le « manque de pédagogie » autour de réformes qui seraient incomprises, il ne s’agit pas juste d’un avis subjectif : de nombreux indicateurs prouvent que l’état de l’Education nationale s’est dégradé ces sept dernières années, notamment du fait des réformes conduite par Jean-Michel Blanquer (ministre de l’Education nationale de 2017 à 2022, ndlr). (...)

En matière budgétaire, les dépenses du ministère sont certes en hausse, mais la dépense intérieure d’éducation restait en 2021 plus faible d’un point de PIB – soit 25 milliards d’euros – que pour la génération des années 1990. En outre, comme l’a illustré l’affaire Oudéa-Castéra, l’enseignement privé est particulièrement privilégié par rapport au public. (...)

Comme dans bien d’autres domaines, la Macronie n’aura donc fait qu’accentuer les inégalités, alors même que l’école est un pilier central de la citoyenneté depuis les grandes lois de la Troisième République.

La mise en concurrence généralisée des élèves a d’ailleurs été une obsession des macronistes en matière éducative depuis 2017. (...)

Tri social généralisé

En triant les élèves tout au long de leur scolarité, la concurrence entre différents enseignements – général et technologique pour les meilleurs, professionnel ou apprentissage pour les moins bons – ne fera que s’accentuer. L’enseignement professionnel reste en effet une filière particulièrement dévalorisée aux moyens insuffisants (...)

Une logique dans laquelle le Rassemblement National entend persister : reçu par le MEDEF avec Eric Ciotti, Jordan Bardella a ainsi indiqué vouloir « orienter plus tôt, plus vite les élèves vers des filières professionnelles » le 20 juin. (...)

Renaissance et le Rassemblement National s’accordent également sur la volonté de mettre fin au collège unique. Hérité du ministre de l’Éducation nationale René Haby en 1975, ce modèle prévoit, dans un souci d’égalité des chances, un enseignement égal et homogène pour tous. Mais les programmes de la droite attachent une importance nette à la notion de mérite, ignorant sciemment que celui-ci est largement lié au milieu social d’origine. (...)

Faute de suffisamment de professeurs, les groupes seront trop chargés, les horaires prolongés, et la séparation des élèves accentuera les stigmatisations et les écarts de niveaux.

Cette stigmatisation des élèves les plus en difficulté irrigue d’ailleurs d’autres propositions de l’actuel gouvernement et de l’extrême-droite. Le RN propose ainsi la mise en place de sanctions financières contre les familles d’élèves trop absents – suspension des allocations familiales et des bourses scolaires – et des sanctions contre les encadrants des établissements qui ne ferait pas appliquer des « sanctions plancher » aux élèves perturbateurs. La majorité sortante a repris la même rhétorique depuis les émeutes de l’été 2023, en annonçant étudier des amendes pour manque d’assiduité – une mesure qui n’a aucun effet sur l’absentéisme lorsqu’elle fut appliquée entre 2011 et 2013 – et à travers la création de « stages de rupture » dans des internats pour les élèves « perturbateurs ». Dans un cas comme dans l’autre, l’effet de la classe sociale et des inégalités sur les comportements et résultats des élèves n’est jamais pris en compte.

Les enfants handicapés, dont le nombre a plus que triplé suite à la réforme instaurant « l’école inclusive » en 2005, sont eux aussi largement délaissés par le RN et Renaissance. Le premier n’aborde tout simplement pas leur situation dans son programme alors que plus de 400.000 jeunes sont concernés. Quant au parti présidentiel, il a continuellement rechigné à offrir de meilleures conditions de travail et rémunérations aux AESH qui aident ces élèves et s’est un temps déchargé sur les collectivités territoriales en ce qui concerne le paiement de leurs heures de travail sur la pause méridienne. Avec le RN comme avec Macron, les élèves en situation de handicap continueront donc de subir une éducation incomplète et de changer régulièrement d’AESH, tandis que ces derniers seront toujours déconsidérés.

Salaires et recrutements insuffisants (...)

Le manque d’enseignants ne semble pourtant inquiéter ni le RN, ni le camp présidentiel. Aucun des deux programmes ne propose en effet d’augmenter l’embauche des équipes d’encadrement des élèves. Pire : depuis les coupes budgétaires annoncées par surprise en février, le ministère de l’Éducation nationale prévoit de supprimer quelque 11.000 postes, dont 6.400 d’enseignants ! Outre les économies, le gouvernement s’appuie sur une baisse de la natalité depuis les années 2000 – qui fait mécaniquement baisser le nombre d’élèves – pour justifier sa décision. Alors que la France a déjà les classes les plus surchargées d’Europe (25,6 élèves par classe en moyenne dans le secondaire et 22,1 dans le primaire), il aurait pourtant été opportun de profiter des évolutions démographiques pour réduire le nombre d’élèves par classe afin d’assurer des meilleures conditions d’enseignement. (...)

Pour le Front populaire, priorité à l’égalité et au choc de moyens

En opposition frontale au projet du RN et d’Emmanuel Macron, le Nouveau Front Populaire promet au contraire un renforcement significatif des moyens alloués à l’éducation et des mesures fortes pour renforcer l’égalité entre les élèves. L’abrogation des réformes d’Emmanuel Macron, largement partagées par le RN, sera la première priorité. Parcoursup et le « choc des savoirs » instaurant les groupes de niveaux seront ainsi supprimés. Un vaste choc de moyens est également prévu, comprenant des revalorisations de salaires, une titularisation des AESH, la création d’un service public d’accompagnement du handicap et des embauches. Différentes mesures qui doivent permettre d’améliorer les conditions d’enseignement et de baisser le nombre d’élèves par classe à 19, objectif que se donne l’alliance de gauche pour sa « grande loi éducation ». (...)

Au-delà de ces réformes, le Front Populaire attache aussi une grande importance à l’égalité des chances entre les élèves, en contrôlant plus fortement l’enseignement privé, dont les dotations seraient modulées en fonction du respect ou non d’objectifs de mixité sociale. Par ailleurs, il prévoit aussi de rendre l’école véritablement gratuite dès les 15 premiers jours au pouvoir s’il remporte les élections : cantine scolaire, fournitures, transports et activités périscolaires seraient entièrement pris en charge, afin de ne plus exclure les enfants dont les parents n’ont pas de moyens suffisants pour ces différentes dépenses. Ce faisant, il reprend ici la demande de très nombreux parents d’élèves et de syndicats, qui n’ont cessé d’alerter sur ces besoins d’urgence pour renforcer le service public. (...)