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Didier Dubasque
Pourquoi il est important que les étudiant(e)s apprennent à se passer de Chat-GPT ?
#IA #ChatGPT #apprentissage #education
Article mis en ligne le 11 novembre 2024
dernière modification le 6 novembre 2024

Dans un article intéressant intitulé « ChatGPT : le mythe de la productivité » Hubert Guillaud nous explique qu’avec les applications de ce type, le but de l’écriture est de remplir une page, pas de réaliser le processus de réflexion qui l’accompagne. Or écrit-il. C’est justement tout l’inverse dont nous avons besoin ! À l’heure où l’intelligence artificielle (IA) s’immisce de plus en plus dans notre quotidien, il est utile de s’interroger sur son impact sur la formation, en particulier sur l’apprentissage des étudiants. Alors que des outils comme ChatGPT promettent de faciliter de nombreuses tâches, il s’agit de comprendre pourquoi il est important que les apprenants puissent se passer de ces technologies, notamment dans le cadre de leurs études.

L’IA et le développement des compétences cognitives

L’un des arguments les plus convaincants en faveur d’un apprentissage sans IA porte sur le développement des compétences cognitives. (...)

Une analogie avec l’entraînement sportif peut vous aider à comprendre pourquoi : de même que s’entrainer à soulever des poids développe la force musculaire nécessaire à diverses disciplines sportives, l’écriture régulière cultive des compétences essentielles pour les futurs professionnels. Or, nous avons besoin de travailleurs sociaux qui pensent par eux-mêmes et s’entrainent sans chercher leurs idées dans des réponses formatées par des chabots.

L’utilisation d’outils d’IA comme ChatGPT pour réaliser des devoirs équivaut à « amener un chariot élévateur dans une salle de musculation pour entrainer les athlètes ». (...)

L’effort intellectuel doit être valorisé

Un autre aspect à ne pas négliger de l’apprentissage sans IA concerne la valeur intrinsèque de l’effort intellectuel fourni par l’étudiant. Bien que certains types d’écriture puissent sembler superflus ou purement académiques, le processus de création de texte, même lorsqu’il n’est pas particulièrement créatif ou évident, a une valeur en soi. Il permet de développer des compétences, d’approfondir la compréhension d’un sujet et de structurer la pensée. D’où l’intérêt de continuer à demander aux élèves de formaliser leurs pensées en synthétisant et en analysant des textes.

Le risque d’une utilisation excessive de l’IA est de créer un cercle vicieux où la production de textes de qualité médiocre devient la norme. (...)

Un risque de déshumanisation de l’apprentissage

Distinguons d’abord deux aspects importants qui entrent dans le champ de la formation : la compétence et l’intelligence. La compétence correspond à la façon dont vous accomplissez une tâche, tandis que l’intelligence correspond à l’efficacité avec laquelle vous allez acquérir de nouvelles compétences. Cette différenciation nous conduit à comprendre une limitation fondamentale de l’IA : bien qu’elle puisse être extrêmement compétente dans l’exécution de tâches spécifiques (par exemple, résumer un texte), elle manque de la flexibilité et de l’adaptabilité qui caractérisent l’intelligence humaine. Elle ne dispose pas d’intelligence à proprement parler. (...)

Cette technologie risque de nous traiter comme des êtres inférieurs à ce que nous sommes réellement : des créateurs et des interprètes de sens. (...)

L’acte d’écrire ou de communiquer, même lorsqu’il n’est pas particulièrement original, porte une signification profonde pour l’auteur et son audience. Cela concerne aussi bien la création artistique que la communication quotidienne. L’intention et le contexte humains sont essentiels. (...)

L’IA et la promotion de l’incuriosité

Rob Horning, philosophe du net, nous met en garde contre le fait que les modèles de langage de grande taille (LLM) « marchandisent l’incuriosité ». Ces systèmes peuvent fournir des informations, mais ils sont incapables d’expliquer pourquoi ces informations ont été produites ou organisées d’une certaine manière. Cette limitation est particulièrement problématique dans un contexte éducatif, où la compréhension du processus de création et d’organisation des connaissances est aussi importante que les connaissances elles-mêmes.

L’utilisation de l’IA dans l’éducation risque de promouvoir une approche assez superficielle de l’apprentissage. (...)

Or aujourd’hui que souhaitons-nous pour les futurs travailleurs sociaux ? (...)

Le mythe de la productivité

Un autre aspect problématique de l’utilisation de l’IA dans la formation est la promotion du « mythe de la productivité ». (...)

Cette perte de maîtrise s’apparente à ce que Rob Horning décrit comme le travail aliéné dans le contexte capitaliste. (...)

L’impact sur l’apprentissage

Les effets potentiellement néfastes de l’utilisation excessive de l’IA nous conduit dans des process un peu absurdes. Comme le souligne Ian Bogost, nous assistons déjà à des scénarios dans lesquels des étudiants génèrent des devoirs avec l’IA, que les enseignants font ensuite corriger par l’IA. On en arriverait vite à marcher sur la tête. Cette situation, qui peut exister, soulève des questions importantes sur la valeur et l’intégrité du processus éducatif.

Le risque majeur est que cette technologie rende caduc certains des meilleurs outils d’apprentissage, notamment l’écriture elle-même. L’écriture n’est pas seulement un moyen de communiquer des idées, c’est aussi un processus qui permet de clarifier la pensée, d’approfondir la compréhension et de développer des compétences critiques. (...)

Il existe une grande différence entre l’apprentissage automatique et la « pensée machine » explique Ron Carucci dans le magazine Forbes. (...)

Plus les étudiants utilisent les machines pour réfléchir à leur place, plus ils deviennent dépendants de ces machines, ce qui perturbe les processus cognitifs clés. (...)

En conclusion

En conclusion, bien que l’IA offre des possibilités assez vertigineuses dans de nombreux domaines, son utilisation dans la formation, en particulier pour des tâches fondamentales comme l’écriture et la recherche, soulève de sérieuses préoccupations. Il est esentiel que les étudiants apprennent à se passer de ces outils, non pas par rejet de la technologie, mais pour préserver et développer des compétences essentielles qui ne peuvent être acquises que par l’effort et la pratique.

L’éducation ne consiste pas seulement à acquérir des connaissances, mais aussi à développer la capacité de penser de manière critique, de résoudre des problèmes et de s’adapter à de nouvelles situations. (...)

Alors que beaucoup utilisent l’IA sans le dire, il reste essentiel de trouver un équilibre entre l’utilisation de ces technologies comme outils d’assistance et la préservation des processus d’apprentissage. (...)

En fin de compte, l’objectif de la formation devrait être de former des futurs professionnels capables de penser par eux-mêmes, de remettre en question les idées reçues et de contribuer de manière significative à la société. Ces compétences ne peuvent être pleinement développées que par un engagement actif dans le processus d’apprentissage, sans raccourcis artificiels. (...)